Terrain d’Entente a été invité a cette rencontre animée par Marie Aleth GRARD, vice présidente d’ATD Quart Monde.
Depuis plusieurs années nous sommes préoccupés des difficultés grandissantes que les enfants manifestent à l’école. Nous nous sommes engagés dans l’action « 1001 territoires » sur le quartier de Tarentaize. Plusieurs parents avaient contribués à ces temps de réflexion. Depuis deux ans, nous cheminons avec des enseignants membres de l’ICEM pédagogie Freinet, pour engager un travail sur les possibilités d’ouvrir les écoles aux parents pour favoriser un accueil respectueux du milieu de vie des enfants scolarisés.
Marie Aleth GRARD est membre du conseil supérieur des Programmes, elle siège au CESE à la section de l’éducation, de la culture et de la communication. Elle a travaillé en lien avec JP Delahaye, directeur général de l’enseignement. Elle nous a présenté la réflexion du CESE sur la réduction des inégalités à l’école dues aux origines sociales.
Le rapport du CESE de septembre 2011 sur les « inégalités à l’école » dénonçait déjà le fait que l’école n’arrive pas à atténuer les inégalités dues à l’origine social et culturelle. La loi de Refondation de l’école du 8 Juillet 2013 insiste sur le caractère inclusif de l’école, et qu’il est essentiel de se préoccuper de la réussite de tous. Les conditions d’une école inclusive: garantir une place en maternelle dès deux ans, éviter les fermetures d’école dans les petites communes, renforcer les RASED. Tous les parents doivent être accueillis à l’école à égale dignité. Tous les enseignants doivent être formés pour mieux comprendre le milieu d’origine des enfants scolarisés. Ils doivent être également formés à la pédagogie de la coopération qui permet d’avantage la réussite de tous.
Permettre à tous les enfants et les jeunes de devenir citoyens dans une démocratie, pleinement insérés dans la société, tel est le défi que l’école doit relever.
La réussite à l’école signifie que les élèves doivent ont tous acquis le socle commun de connaissances et de culture, et qu’ils choisissent leur orientation.
Chaque année, depuis 15 ans, plus de 100 000 jeunes sortent du système scolaire sans aucun diplôme.
Pour aborder cette question des inégalités dues aux origines sociales et culturelles, il est nécessaire d’entendre la parole des parents socialement les plus exclus. C’est à partir des progrès des enfants des familles les plus défavorisées que nous pourrons mesurer la capacité de l’école à les faire réussir tous. Dans le cadre de cette recherche à l’initiative du CESE, un groupe « croisement » s’est réunit sur 7 journées: 5 chercheurs, 5 enseignants, 5 acteurs de quartier, 5 parents solidaires, 10 parents qui vivent dans la grande pauvreté
Ces journées d’échange ont permis de conclure que la réussite de tous est possible si:
– les enseignants travaillent en équipe, plus de maîtres que de classe. Favoriser les échanges pédagogiques entre zones prioritaires et les autres territoires
– tous les parents sont accueillis à l’école
– une recherche permanente d’une pédagogie adaptée (respecter le découpage par cycle de 3 ans, développer la pédagogie de la coopération, développer l’apprentissage de la démocratie par la prise de parole donner à tous les élèves les moyens de faire leur travail personnel sur le temps éducatif)
– une gouvernance bienveillante et exigeante. (former les personnels d’encadrement à l’animation de l’équipe et au travail collectif, mettre en place une réflexion sur l’évaluation des enseignants, développer des programmes de recherche action en établissements)
Il est proposé d’expérimenter dans des écoles volontaires pendant 5 ans, ce cahier des charges
L’éducation prioritaire ne pas être la seule réponse, elle ne garantit pas une école ouverte et compréhensible pour tous.
L’école porte en elle ses propres forces. Les équipes pédagogiques cherchent, créent, innovent dans le but de ne laisser aucun élève au bord de la route. Elles ouvrent des voies qui devraient permettre de surmonter cet obstacle du déterminisme social auquel se heurte l’école.
L’école n’est pas le seul lieu d’éducation, des projets en partenariat avec les quartiers peuvent naître avec tous ces collectifs qui construisent un tissu de relations où les parents ont une place privilégiée.
Jean Zay, ministre de l’éducation à l’époque du Front populaire, estimait que l’école et les collectifs d’éducation populaire étaient les deux jambes de l’éducation et devaient oeuvrer ensemble.
9 Millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont certains vivent dans la grande pauvreté (cumul de précarités qui concernent le non accès à l’emploi, au logement, à la santé)
35% des personnes ne font pas la demande de RSA (12 pages à remplir)
Un enfant pauvre, quand il arrive à l’école maternelle a bénéficié de 1000 heures de moins d’histoires racontées.
Il se retrouve souvent dans une posture de conflit de loyauté qui bloque les apprentissages de manière inconsciente. Il se retrouve dans une double solitude, à l’école il ne peut pas parler de son environnement social, en famille il ne peut pas partager ses expériences scolaires. Les parents ne peuvent pas s’intéresser à ce qui se vit à l’école parce qu’ils n’ont aucune connaissance de cette réalité. (On pose des questions sur l’école en fonction de ce qu’on en connaît: les codes, les langages)
L’accueil des parents à l’école facilite la découverte et la connaissance du milieu. (accueillir tous les parents sur des temps formels et informels, multiplier les espaces parents avec un animateur, former les parents délégués en réfléchissant à un statut pour ces parents). Ouvrir l’école au partenariat qui a une connaissance du territoire sur lequel intervient l’école..
Les inégalités scolaires sont inhérentes aux dispositifs.
84% des enfants qui se retrouvent en SEGPA sont issus de milieux défavorisés (l’école estime qu’elle ne sait pas faire avec ces enfants là!). 1% obtiennent le brevet
37% réalisent un CAP qu’ils n’ont pas choisi.
58% sortent du système scolaire sans aucun diplôme.
Pour réduire ces inégalités: meilleure inclusion des SEGPA dans les collèges, supprimer le volet social pour les affectations, redonner à ces affectations un caractère réversible, multiplier les dispositifs permettant aux enfants de grandir ensemble.