Mois : janvier 2021

LE PROJET VRAC : une alimentation de qualité accessible à tous.

Au vu de l’impact de l’alimentation et de sa production sur notre santé et sur la nature, au vu de l’intérêt manifesté sur cette question par une majorité d’habitants des milieux populaires, au vu de leur impossibilité majeure à y avoir accès, Il est nécessaire de développer un cadre qui rende accessible pour tous une alimentation de qualité, issue d’une production écologique. L’objectif est de construire une dynamique qui engage chacun d’entre nous à en devenir partie prenante.

Le projet VRAC Saint-Etienne (Vers un Réseau d’Achat en Commun) est issu d’une réflexion partagée de différents acteurs et associations d’habitants du territoire stéphanois, posant le constat d’inégalités persistantes d’accès à une alimentation de qualité, malgré le développement de nombreuses initiatives locales en la matière. La situation très précaire de certaines familles est l’explication essentielle de leur absence de participation concrète.

En passant par le groupement d’achat, l’association VRAC Saint-Etienne vise à offrir la possibilité aux habitants des quartiers de se réunir pour commander à prix coûtants, des produits biologiques, écologiques et locaux,  répondant ainsi aux enjeux sociaux et environnementaux actuels.

Cette démarche s’attache à placer au centre l’équitable accessibilité des produits pour les familles et la rémunération des producteurs. Il est indispensable de reconnaître à tous le droit à une alimentation de qualité et la possibilité pour ceux qui nous nourrissent de pouvoir vivre dignement de leur travail.

Cette démarche ne deviendra réellement soutenable et transformatrice, que si nous posons d’emblée la question financière pour les ménages et la rétribution juste des agriculteurs. Pour l’accès de tous à une alimentation saine et locale il est indispensable de sortir des différentes formes d’aides alimentaires humiliantes. Dans différents espaces de réflexion, et de réalisations concrètes de solutions alternatives, on envisage cette question sous l’angle de la sécurité sociale alimentaire.

NOS CONSTATS

Le coût de la nourriture reste une préoccupation permanente des familles aux faibles revenus. Il est très fréquent que les foyers renoncent à une alimentation de qualité par manque de moyens financiers. 

Certaines dynamiques engagées  permettent d’affirmer qu’il est indispensable d’aller à la rencontre des gens, d’être présents sur les territoires pour rendre possible des actions transformatrices. La précarité est un vécu si contraignant que la tendance pour une personne qui la subit est de renoncer à des droits fondamentaux comme l’alimentation de qualité, l’accès à la santé, à la culture…    

 CE QUE NOUS PROPOSONS

– L’association VRAC favorise le développement de groupements d’achats de produits de qualité (biologiques, équitables) *dans les quartiers prioritaires de la Politique de la Ville* (à discuter). En partageant des valeurs communes de solidarité, de justice sociale et alimentaire et de valorisation de produits de qualité et de leursproducteurs, l’objectif est d’offrir l’accès du plus grand nombre à des produits de consommation courante de qualité à prix accessible.

Elle se base sur l’implication des adhérent.e.s dans le fonctionnement de leur groupement d’achat : il s’inscrit dans une visée émancipatrice de réappropriation de l’alimentation. L’objectif est de créer des rencontres qui produisent du plaisir partagé et non de l’anxiété autour des questions d’alimentation, de santé et d’environnement.

Au sein des groupements, les prix sont raisonnables grâce à :

– la commande de produits en grande quantité à des producteurs engagés;

– la réduction des coûts intermédiaires en priorisant les circuits courts et en réduisant les emballages superflus;

– la vente à prix coûtant et sans marge.

– Des membres de l’association organiseront chaque mois la prise des commandes dans les lieux de permanence physique avec tous les habitants volontaires, complétées par des commandes passées en ligne sur la plateforme cagette.net. Une douzaine de jours plus tard, ils livreront les produits sur chaque point de distribution sur une demi-journée. Des événements conviviaux « autour de la cuisine », avec les habitants, seront aussi proposés régulièrement.

– Il s’agit de s’appuyer sur les dynamiques de collectifs déjà engagés dans la distribution des produits issus de l’agriculture paysanne locale et sur les structures de proximité impliquées dans la vie des quartiers de façon à mutualiser les ressources et faire converger les enjeux.

– Les produits du groupement d’achat incluront des produits alimentaires en vrac (huile d’olive, farine, chocolat, sucre, fruits secs, riz, pâtes, légumineuses…), des produits d’épicerie transformés (jus de fruits, compotes, café, thé, confitures, miel, purée de tomates…) produits d’hygiène (shampoings et savons, crèmes, dentifrices, lessive…),  et des produits frais locaux (fromages…).

– Les produits seraient vendus à prix coûtant aux habitants des QPV. Une cotisation solidaire peut s’appliquer pour les adhérents habitants hors-QPV, qui doivent pouvoir participer au projet sans devenir majoritaires parmi les adhérents : la priorité d’adhésion au groupement peut être donnée aux habitants des QPV. 

– L’association devra solliciter la participation et l’engagement des collectivités locales et des bailleurs au projet à sa gouvernance et leur financement dans l’objectif de soutenir un poste de départ et des frais de fonctionnement. Les distributions et prises de commandes ayant lieu dans les centres sociaux et structures de proximité souhaitant mettre à disposition des salles, il n’y aurait pas de loyer à payer pour les distributions.

Publié par Terrain D'entente dans 2021, Chanson, Travail sur la question alimentaire, 0 commentaire

Pour une alimentation digne pour tous.

Terrain d’Entente a contribué à l’émergence de VRAC (Vers un Réseau d’Achat en Commun) sur le quartier de Tarentaize/Beaubrun.

Ce projet est issu d’une réflexion entre différents acteurs de terrain, notamment :

– « De la Ferme au Quartier » qui développe depuis 10 ans la dynamique des AMAP dans les quartiers. Son projet social initial était de rendre accessible cette distribution de paniers aux personnes à faibles revenus.

– « La Fourmilière », supermarché coopératif, qui souhaite que cet espace permette l’implication de tous, sans discrimination. Le coût des aliments, les parts pour devenir coopérateur, sont estimés de façon à limiter au maximum les freins à la participation.

– « Terrain d’Entente » dont un de ses objectifs est de réfléchir aux conséquences sociales de la pauvreté et à la manière de les faire reculer.

Une rencontre entre des membres de la Fourmilière et des adhérentes de Terrain d’Entente a mis en évidence une préoccupation et une volonté partagées de favoriser une alimentation de qualité pour tous, qui contribue à une meilleure santé et à la préservation de l’environnement. Malgré tout, depuis l’ouverture du magasin, et différentes tentatives pour organiser la découverte de cet espace, aucun.e habitant.e n’est devenu.e coopérateur.rice.

La situation très précaire de ces familles est l’explication essentielle de leur absence de participation concrète. Les dynamiques engagées par Terrain d’Entente sur le quartier permettent d’affirmer qu’il est indispensable d’aller à la rencontre des gens, d’être présents sur les territoires pour rendre possible des actions transformatrices.

La précarité est un vécu si contraignant que la tendance pour une personne qui la subit est de renoncer à des besoins fondamentaux comme l’alimentation de qualité, l’accès à la santé, à la culture…

D’autres structures ont rejoint VRAC pour s’y investir concrètement: L’Amicale Beaubrun, le centre social le Babet, l’AMAP de Beaubrun,

Nous sommes d’accord sur ces constats: Le coût de la nourriture reste une préoccupation permanente des familles des milieux populaires. Il est très fréquent que les foyers renoncent à une alimentation de qualité par manque de moyens financiers.

Or les prix « coûtants » affichés sur le catalogue VRAC restent pour beaucoup de familles inaccessibles. Les familles les plus pauvres ont été gravement impactées par les conséquences des confinements successifs, elles se retrouvent pour beaucoup surendettées. De plus en plus de personnes sont contraintes de faire appel à l’aide alimentaire.  La volonté de Terrain d’Entente est de rendre accessible à tous ce qui est indispensable à une existence digne. La possibilité de pouvoir subvenir aux besoins élémentaires, et également de choisir une alimentation de son choix nous semble être des objectifs à ne jamais perdre de vue.

Nous recherchons sans relâche, des solutions pour assurer à tous cette possibilité.

Terrain d’Entente a donc initié une rencontre pour engager différents acteurs avec VRAC 42, pour se questionner ensemble sur cette réalité très prégnante à St Etienne de situations de grandes précarité qui ne cessent d’augmenter. Les Brigades de solidarité, La Fourmilière, le réseau des AMAPS, la Fabrique de la Transition, De la Ferme au Quartier se sont rencontrés  fin décembre 2020.

Tous ces collectifs sont investis sur la question de l’alimentation et s’engagent dans des actions qui se déclinent de manière très différente.

Les Brigades de Solidarité ont pris le parti de s’adresser à tous ceux qui ne sont pas pris en compte dans les différents dispositifs d’aide alimentaire. Ils se sont organisés depuis le premier confinement pour repérer les personnes en demande d’aide, récolter des dons et les distribuer régulièrement.

La Fourmilière assure, auprès des coopérateurs, une collecte de denrées qui sont destinées à plusieurs lieux de solidarité dont  les Brigades.

Depuis sa fondation, ce marché coopératif à la volonté de rendre son accès possible pour tous. Son mode de fonctionnement particulier avec ses contraintes sont un élément d’explication de l’absence de coopérateurs issus des quartiers populaires.

Terrain d’Entente depuis plusieurs années s’interroge sur les meilleurs conditions possibles pour rendre une alimentation de qualité accessible à tous. Des liens se sont construits avec la Fourmilière, nous avons contribué à l’émergence de VRAC. Nous poursuivons nos recherches.

Les AMAPS, depuis plusieurs années s’interrogent sur les questions d’accessibilité alimentaire. Différentes tentatives pour constituer des paniers solidaires ont été réalisées, en lien avec d’autres structures comme le Secours Populaire, les producteurs (concernant les invendus).

De la Ferme au Quartier recherche un mode d’organisation financière pour rendre accessible ses produits. Un lien se construit avec les Brigades pour tenter un fonctionnement en réseaux avec les producteurs.

VRAC 42  se trouve à la croisée de tous ces chemins, de ces différents constats de l’immense difficulté à pouvoir rejoindre ceux qui sont aujourd’hui condamnés à consommer des produits que nous pouvons estimer dangereux, pour la santé, pour l’environnement, et dont le mode de  production met en péril l’agriculture paysanne.

La Fabrique de la Transition s’est constituée pour générer de la coopération sur les projets. Elle a contribué à la constitution de VRAC 42

Ce qui  est commun à tous ces collectifs, c’est essentiellement la question de la justice sociale, de l’accès à l’alimentation pour tous. Notre volonté est de s’adresser à ceux pour lesquels rien n’est accessible, qui ne sont pas partie prenante de tous ces réseaux. Nous sommes confrontés  à l’urgence sociale pour tous ceux qui n’ont pas de quoi se nourrir au quotidien, à l’urgence sanitaire pour tous ceux qui sont contraints à une alimentation polluée et à l’urgence environnementale, avec l’enjeu de la production alimentaire (comment sortir de la logique de l’agro-industrie et de tout son cortège d’aides, avec la  banque alimentaire comme variable d’ajustement, comment soutenir une agriculture paysanne viable pour les producteurs?)

L’urgence sociale est une question immédiate avec une organisation en réseau qui est déjà effective et qu’il faut amplifier : donner accès à de la nourriture pour tous ceux qui n’en n’ont pas les moyens d’une manière digne (l’accès aux colis alimentaires impose aux « bénéficiaires » des justifications humiliantes).

Le problème essentiel des différents « dispositifs d’aide alimentaire » est qu’ils maintiennent ceux qui y ont accès dans un statut de demandeurs de manière souvent définitive et construit un système de dépendance, de sélection et d’exclusion.

Le recours aux aides d’urgence devrait être un moment exceptionnel dans  l’existence, pour qu’ensuite chacun puisse avoir accès à des ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins vitaux.

Tout en poursuivant les actions de solidarité et d’entraide, nous sommes confrontés à la question de notre contribution à ce que chacun puisse se nourrir  correctement et de manière digne, puisse choisir sa nourriture en fonction de ses goûts et habitudes pour une démocratie alimentaire.

Il y a nécessité de construire une réflexion et des démarches transformatrices qui prennent en compte les besoins vitaux en tant que droits universels et apportent des réponses pour pallier  aux catastrophes environnementales.  Un travail est en cours et que nous pouvons rejoindre sur la construction d’une sécurité sociale de l’alimentation, les engagements des communes sur le maraîchage…..

L’objectif est de prendre en considération les besoins sur toute la commune de St Etienne, l’organisation de l’alimentation sur tout le territoire, et de permettre une connexion entre les différents énergies pour tenter de  coordonner les dynamiques.

Nous aimerions construire une réflexion avec les  producteurs, les distributeurs pour rechercher un mode d’organisation qui nous permette de définir collectivement ce que nous voulons manger, comment on le produit, de façon à ce que ceux qui nous nourrissent puissent vivre dignement et comment en assurer l’accès à tous. Dans un premier temps, nous envisageons de tenter de construire une caisse de solidarité qui permette à chaque stéphanois de consommer le plus possible de la qualité.

Le lien avec la Fourmilière et la Ferme au Quartier vont nous permettre de mettre en synergie producteurs, distributeurs, transformateurs, clients, et faire des propositions de solidarité (prix arrondis, points de la carte de fidélité à destination des collectifs, systèmes de « prix cassés »)

Nous souhaitons engager d’autres collectifs à nous rejoindre.

Publié par Terrain D'entente dans 2021, Chanson, Travail sur la question alimentaire, 0 commentaire

Appel à constituer un Fond de Solidarité pour une alimentation de qualité pour tous.

Terrain d’Entente, VRAC 42 (vers un réseau d’achat en commun), Les Brigades de solidarité, La Fourmilière, le réseau des AMAPS, la Fabrique de la Transition, De la Ferme au Quartier ont décidé d’interpeller tous les acteurs potentiellement concernés par l’alimentation et sa qualité.

Au vu de l’impact de l’alimentation et de sa production sur notre santé et sur la nature, de l’ impossibilité majeure à y avoir accès pour un nombre toujours croissant de nos concitoyens, il est nécessaire de développer un cadre qui rende accessible une alimentation issue d’une production écologique et équitable pour tous , avec la possibilité pour ceux qui nous nourrissent de pouvoir vivre dignement de leur travail.

Notre système alimentaire est principalement basé sur la loi du marché. Ses impacts sur l’environnement, la cohésion sociale et la santé de tous sont considérables. Ce système souffre d’un sérieux déficit démocratique.

L’alimentation de qualité, la préservation de l’environnement, la reconnaissance des travailleurs de la terre, la relocalisation de la production alimentaire, doivent être considérées comme une question de santé publique.

A St Etienne, de nombreux collectifs sont investis sur la question de l’alimentation et s’engagent dans des actions qui se déclinent de manière très différente.

Nous sommes confrontés  à l’urgence sociale pour tous ceux qui n’ont pas de quoi se nourrir au quotidien, à l’urgence sanitaire pour tous ceux qui sont soumis à l’aide alimentaire ou aux produits issus de la grande distribution, et à l’urgence environnementale, avec l’enjeu de la production alimentaire (comment sortir de la logique de l’agro-industrie et de tout son cortège d’aides, avec la  banque alimentaire comme variable d’ajustement, comment soutenir une agriculture paysanne viable pour les producteurs?)

Il s’agit également de s’adresser à ceux pour lesquels rien n’est accessible, et qui ne sont pas partie prenante de tous ces réseaux, pour justement les inclure.

Tout en poursuivant les actions de solidarité et d’entraide, nous sommes confrontés à la question de notre contribution à ce que chacun puisse se nourrir  correctement et de manière digne, qu’il puisse choisir sa nourriture en fonction de ses goûts et habitudes,  pour une démocratie alimentaire.

Il y a nécessité de construire une réflexion et des démarches transformatrices qui prennent en compte les besoins vitaux en tant que droits universels et apportent des réponses pour pallier  aux catastrophes environnementales.

L’enjeu est de pouvoir définir collectivement ce que nous voulons manger, comment le produire et comment en assurer l’accès à tous.

Pour envisager un changement résolu du modèle agricole qui ferait la part belle à l’agriculture paysanne, durable sur les plans sociaux et environnementaux, pour rendre possible la souveraineté alimentaire, et casser les dépendances avec les secteurs transnationaux agro-alimentaires, des étapes sont incontournables.

Un travail de réflexion est en cours sur la construction d’une sécurité sociale de l’alimentation. Des communes s’engagent pour augmenter les possibilités  de maraîchage à destination des collectivités. Le réseau des AMAPS, des coopératives envisagent le développement de systèmes solidaires qui concernent de manière équitable les producteurs, les distributeurs, les consommateurs.

A ce jour, il semble possible de nous engager ensemble pour constituer un fond de solidarité pour que tous les stéphanois puissent avoir accès au mode d’alimentation de leur choix.

Vous êtes différents interlocuteurs concernés: les différents espaces de distribution, les producteurs… C’est ensemble que nous pourrons faire pression sur les pouvoirs publics de façon à prendre en considération les besoins de tous pour assurer l’organisation des circuits alimentaires respectueux de chacun, sur tout le territoire.

« Le droit fondamental à la nourriture suffisante est d’une importance cruciale pour la jouissance de tous les droits »   (Hilva Elver, rapporteuse spéciale du droit à l’alimentation)

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Travaille et rentre chez toi !

 En réponse à l’urgence sanitaire, à l’épidémie qui se développe, le gouvernement a imposé une nouvelle organisation à toute la société, de manière toujours plus autoritaire et répressive. A partir de l’école primaire, les enfants et les jeunes, et avec eux, tous ceux qui sont employables, tous ont été sommés de sortir de leur domicile pour la seule raison considérée comme nécessaire et indispensable: le travail ! Le reste nous a été interdit ou limité à sa plus simple expression: faire les courses, promener son chien …. 

La vie culturelle, sociale, religieuse, affective… tout est terminé. La seule vie qu’on veut sauver est la vie biologique, celle du corps. Or, la vie ne se résume pas à un corps, il y a aussi les raisons de vivre. 

Cette épidémie nous renvoie à la menace de mort. La maladie et la mort sont des réalités de l’existence que nous redoutons tous. Nous espérons échapper à des maladies graves, invalidantes, et nous avons peur de la mort! Nous cherchons même à faire reculer son échéance. Nous saluons à juste titre comme un progrès, une victoire, l’augmentation de l’espérance de vie (seulement dans certaines régions du monde, dans beaucoup d’autres, la mort frappe au quotidien avec une ampleur dramatique). 

L’espérance de vie, il est bien question de cela aujourd’hui. Qu’espérons-nous vivre en fait? Que souhaitons-nous chaque jour pour nous, pour nos proches, pour notre vie en commun? Quel élan nous fait nous lever le matin, qu’est ce qui nous pousse à sortir de chez nous? Quelles envies nous mobilisent pour construire des projets, réaliser des actions? 

Est ce que nos ambitions, nos aspirations se résument chaque jour au fait d’avoir à aller travailler, de retrouver le chemin de l’école? Et pour beaucoup d’entre nous comment considérons-nous notre travail, ou plutôt notre emploi? 

Une promesse de dépassement de soi et d’accroissement personnel? L’opportunité de contribuer à l’évolution de notre vie sur terre, la possibilité pour chacun d’entre nous de pouvoir contribuer au bien commun? Ou bien seulement l’unique moyen de subsistance possible , un simple »gagne pain »? Beaucoup, beaucoup trop, pour qualifier leur emploi précisent « c’est juste alimentaire! » 

Pour une majorité d’enfants et de jeunes, que représente l’école? 

Une promesse de développement et de perfectionnement pour soi-même et avec les autres? La possibilité de savoir pour agir et d’agir pour s’émanciper et s’épanouir? La possibilité de mieux comprendre le monde, l’opportunité de découvrir l’altérité et de là considérer comme une richesse, un partage et non une menace et une réduction de soi même? Ou bien, malheureusement, une expérience douloureuse et humiliante d’échecs, de perte de considération et de confiance en soi? 

Une majorité d’entre nous se retrouve contraint de se rendre à l’école chaque jour et d’exercer un travail sans adhérer véritablement à cet acte obligatoire. Chacun se plie à cette exigence mais à quel prix? 

Le prix de dépressions, le prix du découragement, le prix du désespoir pour tous les « premiers de corvée » et les « derniers de la classe »! 

Une masse impressionnante de nos concitoyens. 

L’épidémie est une réalité que personne ne conteste. Mais son traitement actuel met en péril tout ce qui peut nous donner des raisons d’espérer, de sentir autour de soi du réconfort, de retrouver l’énergie et l’envie. Une atmosphère de mal être s’installe parmi nous. Une atmosphère qui nous épuise, qui nous oblige à puiser au fond de nous même des ressources pour tenter de tenir le coup et ne pas nous effondrer. Mais ces ressources demandent justement du soin pour se renouveler, elles nécessitent le lien aux autres, pour nous sentir bien vivants. Ces ressources se renouvellent lorsque la joie nous habite, lorsque le désir semble pouvoir devenir réalité, lorsque des possibles apparaissent dans un horizon atteignable. 

Aujourd’hui, à l’occasion de ce deuxième confinement il nous est interdit ce qui est justement indispensable à nos vies: le lien, la rencontre, des moments « gratuits » où on se donne mutuellement de l’attention, le bonheur de construire avec d’autres, d’inventer, d’imaginer des possibles parce qu’on devient plus audacieux lorsqu’on se retrouve ensemble. 

Aujourd’hui, on observe ce qui se passe pour beaucoup d’entre nous lorsque ces ressources s’épuisent : pour les familles que nous connaissons bien à Terrain d’Entente, la dépression s’installe, les maladies invalidantes se développent, les démarches pour construire au mieux le quotidien deviennent trop pesantes, beaucoup renoncent, tout en mesurant les conséquences irréparables de cet essoufflement. 

Il aura suffi d’un organisme de quelques nanomètres pour engendrer une crise économique et sociale d’une ampleur inconnue jusqu’alors en temps de paix. Depuis Mars une part grossissante de la population se trouve confrontée à une baisse dramatique de ses revenus, à une dégradation de son quotidien. La violence sociale s’ajoute à la violence de la situation sanitaire de manière fulgurante. Des violences se surajoutent à d’autres violences et la culpabilisation individuelle est prégnante dans tous les discours des autorités gouvernementales. Le soupçon est également jeté sur une catégorie de la population, les plus pauvres! 

Dans le budget de l’ARS, une partie est désormais consacrée à l’éducation aux gestes barrière pour les habitants des quartiers prioritaires de la politiques de la ville! Il est question pour eux d’un apprentissage au lavage des mains et au port du masque. 

Le manque de financement de tous les services publics qu’on nous impose, les restrictions budgétaires, la politique délétère de l’hôpital-entreprise, ces responsabilités là qui incombent aux décideurs politiques, il n’en n’est presque pas question . 

L’attention et le soin portés aux êtres humains comme aux territoires ne sont plus les priorités. 

« Travaille et rentre chez toi! » 

En ce qui nous concerne, à Terrain d’Entente, nous nous efforçons de continuer à prendre soin de ces familles qui vont de plus en plus mal. Nous avons pu préserver le soutient scolaire durant tout ce mois de Novembre, et nous avons augmenter nos périodes de présence. Les enfants étaient nombreux à venir nous rejoindre, et nous n’avons refusé personne. Nous avons su préserver ce qui nous est toujours apparu comme essentiel, l’accueil libre et inconditionnel. Les enfants ont accepté les nouvelles contraintes: le gel hydro alcoolique, le masque, l’évitement de la mobilité dans la salle, le retour au domicile après les leçons. 

La présence soutenue d’adultes durant ces différents temps d’accueil a permis de prendre soin et attention à chacun de ces enfants. Ce qui nous a tous mobilisé: que chaque enfant, chaque jeune s’investisse avec enthousiasme et plaisir dans les apprentissages. Et nous constatons pour beaucoup d’entre eux des progrès réels. Pour certains de ces enfants qui auparavant, n’osaient pas prendre le risque de démarrer un exercice scolaire pour ne pas avoir à affronter un nouvel échec, ces enfants là rentrent enfin dans un processus d’apprentissage. Ils manifestent du plaisir à mieux comprendre et de la curiosité à connaitre et à savoir d’avantage. Nous avons réussi ensemble à construire un climat propice à la concentration, à la réflexion, à l’appropriation du savoir. Nous constatons une fois de plus que c’est la relation, l’attachement, l’encouragement qui créent la motivation, l’envie. 

Du côté de la jeunesse, les ados ont continué à nous solliciter pour réfléchir à leur orientation, les possibilités d’être accueillis en stage s’amenuisent avec à nouveau le risque de vivre l’échec avec tout son cortège de tensions intra familiales. D’autres trouvent encore le courage de nous confier leur détresse et nous sommes extrêmement préoccupés pour certains, de l’évolution de leur parcours. 

Cette démarche d’aller au coeur de la réalité, de la difficulté, de la détresse des enfants, des jeunes, des adultes est l’unique possibilité de retenir la main de celui qui souffre et d’avancer à ses côtés pour éviter qu’il ne s’effondre, pour rester debout et vivants ensemble!. 

Le premier geste humain envers un autre est le soin. Un geste qui ne doit rien à la morale mais à la nécessité, car l’état de nature, l’état premier des humains c’est la vulnérabilité. Sans le soin primordial au nouveau né, il n’y aurait pas eu d’humanité, pas d’aventure humaine, parce que la vulnérabilité est la condition du vivant. 

Dans ce climat autoritaire et répressif, dans ce climat qui développe la peur, le découragement et la dépression, il est urgent d’inventer, et démultiplier des espaces de bien être ouverts à tous. C’est surtout ça notre urgence sanitaire actuelle. 

Josiane GUNTHER le 3 Décembre 2020 

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