Chanson

Rapport moral et d’activité 202/2021

Rapport moral 2020/2021
Quels enseignements tirons nous de nos 10 années de présence sur le quartier de Tarentaize?
Depuis toute cette période, nous nous adressons en priorité, à ceux qui sont très peu représentés dans les structures du quartier, ni dans les réseaux qui s’efforcent de construire des démarches alternatives pour répondre aux enjeux environnementaux et sociaux. Toutes ces familles dont les difficultés, et les aspirations ne sont pas suffisamment prises en compte.
Notre démarche volontaire d’aller à la rencontre des habitants, de faire toujours le premier pas, nous a permis de construire une relation solide et fiable.
Notre effort permanent pour tenter de comprendre comment le quotidien est vécu par les familles permet de libérer la parole. Pour tenter de comprendre au mieux, nous devons accepter d’être déstabilisé, de sortir de nos cadres de référence, de l’environnement qui nous a construit. C’est de cela qu’il est question quand on décide d’aller à la rencontre des gens.
Chercher et accepter de nous tromper, tirer des enseignements de nos erreurs et chaque fois comprendre de manière plus ajustée ce qui est en jeu, ce que développent les injustices et tous les rapports inégalitaires dans le quotidien des familles.
C’est le sens que nous donnons à la notion « d’éducation populaire ». Nous ne pouvons comprendre que ce sur quoi nous agissons ensemble, avec ceux qui ont une réelle connaissance des rapports inégalitaires parce qu’ils les subissent.
Nous tentons de rendre visible ce qui est caché et de créer une dynamique collective pour régler des problèmes concrets.
La précarité ce n’est pas seulement l’absence de ressource. C’est l’enfermement sur un territoire. La plupart des familles vivent dans des logements surpeuplés: on vit à 4 dans un T2, à 8 dans un T5…
La précarité, c’est souvent le délitement du lien social. Parler de ses problèmes c’est la honte et la peur d’être jugé. On se sent indigne, on s’isole, on se décourage puis on renonce. On renonce à des choses essentielles, comme des démarches pour faire valoir des droits.
La précarité, c’est l’absence de perspective d’avenir et la peur que demain soit pire encore.
Mais nous sommes aussi témoins de tous ceux qui développent une « âme de guerrier » et qui se battent envers et contre tout. Ils construisent des relations d’entraide, ils développent leur talent. Ils s’investissent dans des collectifs.
« Nous les galères c’est tous les jours, on sait faire avec ».
Il est nécessaire de développer des ressources inouïes pour ne pas renoncer, pour tout affronter, assumer tous les coups. Certaines femmes expliquent qu’elles ont pris le parti de rire de leurs galères « pour ne pas devenir folle ».
La dynamique du collectif redonne l’énergie et l’envie à beaucoup.
La dynamique collective se crée à partir du moment où on sait aller à la rencontre des gens, où on assure des temps de présence réguliers et fiables, où on est attentif à ce qui se manifeste, où on fait l’effort de comprendre ce qui se vit au quotidien pour ces familles.
Dans ces conditions là, les gens sortent de chez eux, s’organisent, réalisent des projets.
A force de mieux comprendre ce qui est en jeu, toutes ces questions deviennent nos affaires. A partir de cette implication on arrive à construire des actions qui transforment les relations, et les personnes. Un premier pas vers l’émancipation.
Le travail de toutes ces années se traduit, aujourd’hui, dans l’organisation de notre collectif, par l’implication et la prise de responsabilité des femmes, des enfants et des jeunes du quartier qui prennent les initiatives que nous tenons tous ensemble.
Une expérience micro locale pleine de richesses, émancipatrice, mais qui ne peut pas devenir transformatrice.
Plusieurs vivent des situations de plus en plus difficiles: avec des surendettement conséquents, la manifestation de maladies chroniques, des dépressions, et des jeunes qui partent à la dérive.
Il est indispensable de mettre en évidence que les difficultés que subissent ces familles sont le résultat des orientations de nos politiques depuis de nombreuses décennies. Avec le chômage de masse, la casse des services publics, le non accès aux droits fondamentaux, un échec scolaire important, le cloisonnement des espaces sociaux où on ne se rencontre plus nulle part dans notre diversité.
Les personnes qui traversent des difficultés multiples n’ont pas suffisamment de disponibilité mentale pour participer aux différents projets menés sur ces questions qui sont les leurs, et ne se sentent souvent pas légitimes pour s’investir dans des espaces qu’elles ne fréquentent jamais. Il est indispensable de sortir de nos tendances à l’entre soi parce que c’est la seule façon de mieux appréhender la réalité dans ses aspect les plus divers et d’agir de manière adaptée. Les questions d’environnement, d’alimentation, de santé sont nos affaires à tous. Il est indispensable de prendre en compte le point de vue de ceux qui subissent toutes les précarités. Et qu’ils puissent contribuer à la mise en route d’alternatives. Nous avons besoin de leur expertise.
Il faut sortir de l’isolement, s’engager avec d’autres collectifs pour croiser des centres d’intérêt et des préoccupations. Ces questions de précarité doivent être posées à l’ensemble de la société, en terme d’inégalités des droits, d’injustice.
Notre société est segmentée, alors nous voulons développer des opportunités de rencontre avec tous, de façon à sortir de l’enfermement qui distille de la peur, des préjugés. Sortir de l’idéologie de séparation qui provoque toujours plus de discrimination. Face à la montée de l’individu, la réponse est dans le collectif qui est la seule manière de remettre en question culturellement ces conceptions.
Nous retrouvons cette dynamique d’éducation populaire où nous prenons, ensemble, en main des réalités qui nous concernent tous, pour envisager les questions en terme d’ouverture, d’échanges, de manière à reconstruire le tissu social, des liens d’entraide.
Nous voulons surtout mettre en évidence le profond délitement de notre organisation sociale qui ne sait plus prendre en compte les aspirations de tous ceux qui sont le plus impactés par ce système toujours plus inégalitaire, injuste, violent. Un système qui abandonne tous ceux qui souhaitent par dessus tout faire partie intégrante de la société et y apporter leur contribution.
Rapport d’activité 202/2021
I – L’engagement au sein de collectifs. Terrain d’Entente est à l’initiative de la création de collectifs sur des problèmes de société qui nous semblent essentiels.
1 – L’accès aux vacances pour tous.
Depuis toutes ces années, nous nous confrontons à une difficulté majeure pour les familles, celle de ne pas pouvoir offrir de vacances à leurs enfants.
Ne pas pouvoir partir en vacances constitue une réel préjudice pour les enfants, comme pour les adultes. Cet enfermement sur le quartier provoque des tensions entre les habitants, un ennui considérable pour les enfants. Ils évoquent leur stratégie pour que la journée passe plus vite, ils s’endorment très tard pour se réveiller le plus tard possible dans l’après midi, de façon à ce que la journée passe plus vite. Sur le terrain nos temps de partage deviennent plus difficiles, les enfants perdent peu à peu le ressort de l’envie, à force de vivre cet ennui sur de longues périodes de l’été. Avec certains, nous n’arrivons plus à les entraîner dans nos jeux, la relation devient plus problématique.
Certaines familles n’ont aucun lieu de ressourcement, aucune opportunité de rencontre, de découverte et d’échanges sur d’autres façons de vivre et de comprendre la réalité …
Ce qui contribue d’autant à cet enfermement et cet isolement où on n’ose plus sortir de chez soi.
Nous souhaitons retrouver tous ensemble le sens des départs en vacances: la découverte d’autres espaces qui ressourcent, la rencontre de l’autre, différent de soi. Dans cette société qui se segmente, le temps des vacances peut être l’occasion de construire d’autres relations humaines. Cette aspiration concerne de plus en plus de monde, au delà des familles des milieux populaires.
Nous souhaitons envisager des vacances en terme d’ouverture, d’échanges, de manière à reconstruire le tissu social, des liens d’entraide.
Organisation de l’été 2021.
Malgré un financement pas suffisamment conséquent, la commission vacances (constituée de salariés, de bénévoles et d’adhérents) a décidé de poursuivre la dynamique engagée l’été dernier, considérant l’impact positif pour les familles et pour les relations interpersonnelles.
Les séjours familles: Nous avons partagé deux séjours avec des amis scouts qui ont initié les enfants aux plaisirs de vivre au plus près de la nature et d’y apprécier ses ressources. Ils ont concerné 10 familles dont 26 enfants.
Le premier séjour a été vécu comme une évidence que ces partages de culture, cette rencontre avec l’altérité étaient un vrai bénéfice pour nous tous « c’est le pays que j’ai envie d’habiter! » (sic une amie scout).
Les difficultés traversées pendant le second séjour nous ont permis de réfléchir à nos limites et à la meilleure façon de les dépasser. Ce qui nous vaut la chance d’accueillir dans notre collectif, deux nouveaux membres issus de ces séjours. Les interrogations que nous avons partagées leur ont permis de se sentir investis de cette volonté de rejoindre ces familles très blessées par l’indifférence et les incompréhensions des institutions en place. Des familles qui perdent l’espoir que leur situation puisse trouver un jour une issue favorable. Qui perdent l’espoir et qui perdent pied.
Séjours jeunes. Le domaine de Champoly nous a permis d’assurer 4 séjours. 25 jeunes ont pu sortir du quartier. Certains d’entre eux avaient contribué au nettoyage du lieu durant le
printemps. Une expérience qui a été limitée par les différentes périodes de confinement. Mais malgré ces limites, nous avons constaté cet été, un meilleur respect du lieu. Certains habitants deviennent familiers, ce qui contribue à découvrir d’autres modes de relation, d’autres façons de vivre le quotidien.
Sorties au bord de l’eau. 5 sorties ont été réalisées avec des bus de 60 personnes, soit plus de 100 personnes dont certaines ont pu bénéficier de deux sorties (celles qui ne participaient pas aux séjours familles).
Ces sorties sont particulièrement appréciées par les familles. Nous découvrons chaque fois un nouvel espace de nature. Nous organisons une prise en charge collective des enfants, ce qui permet d’accueillir et d’intégrer les nouvelles familles à notre collectif.
Chaque année, nous observons l’impact positif de ces journées partagées pour la vie du quartier. Certaines familles construisent des liens d’amitié, les adultes qui ont pu vivre des temps de plaisir partagés avec les enfants développent une relation plus positive avec eux, ils sont plus reconnus dans leur posture éducative dans le quotidien, et les enfants ne sont pas uniquement perçus dans leur comportement parfois insolent.
Séjours enfants. Nous avons poursuivi notre partenariat séjours sur le site de la Ronde lierre, à Montmiral. La sortie du quartier vers un site sobre et naturel a des impacts très positifs auprès des enfants. On observe chaque fois plus d’entraide et de bienveillance, une limitation des conflits au sein du groupe. Pour les enfants, sortir de Tarentaize, leur permet de reprendre corps avec leur âge réel. Ils n’ont pas à jouer un rôle, à tenir une image, à vouloir paraître plus grands. Ils s’autorisent à être un peu plus eux mêmes. Dans ce contexte différent, ils deviennent plus respectueux des règles. Les répercussions sur le quartier sont très positives.
Nous avons donc reproduit un schéma assez identique avec deux séjours à Montmiral qui a concerné 35 enfants et collégiens.
2 – La co éducation. Initiation d’un « Labo de co éducation » avec les différents acteurs du champ éducatifs, les parents, les enfants, les jeunes. L’éducation mobilise beaucoup de monde et nous manquons d’espaces de concertation pour assurer notre responsabilité collective dans l’éducation et la protection des enfants.
La proposition de ce « Labo de co éducation » est de rechercher les possibilités de faire ensemble. Mais  » faire ensemble de l’éducation », ça ne va pas de soi, d’où la nécessité d’une recherche, pour faire des expériences, pour essayer de trouver des consensus pour pouvoir agir ensemble. Faire une réflexion et une recherche avec les habitants, et tous les partenaires volontaires. Faire l’expérience d’être différent par les responsabilités et les rôles et de tenter de parler ensemble de la même chose. Construire de bonnes conditions de dialogue pour construire des relations qui donnent une place à chacun, et partager des approches différentes qui peuvent devenir complémentaires. L’objectif de cette co éducation est de mettre en commun nos rôles pour accompagner au mieux chaque enfant et lui permettre de trouver sa place parmi les autres.
Une première rencontre du « Labo » a pu se faire à l’occasion des 10 ans de Terrain d’Entente. en Juin. Une cinquantaine de femmes étaient présentes, et ont pu confronter leur réflexion avec la présence de plusieurs collectifs qui nous avaient rejoint à cette occasion. Nous recherchons les structures partenaires qui pourraient s’investir dans l’avancée de ce projet pour cette rentrée.
Le Labo a démarré sur la commune du Chambon malgré les différentes périodes de confinement. Les élus se sont engagés pour favoriser cette initiative. Plusieurs groupes de paires ont pu réfléchir pour définir les notions d’éducations, de co éducation et envisager des possibilités concrètes pour créer des espaces de concertations avec les différents acteurs concernés.
3 – La Solidarité alimentaire.
La pauvreté s’aggrave, notamment depuis le premier confinement. Pour survivre, beaucoup ont recours aux aides, aux colis alimentaires.
Nous déplorons différentes difficultés concernant ce système d’aide.
Tout d’abord, la situation d’indignité dans laquelle sont plongés les demandeurs:
– Pour faire face aux demandes qui sont croissantes, les associations caritatives ont pris le parti de réduire la période de distribution pour chacun. Certains vont « bénéficier » des colis sur quelques mois, voire une fois par mois!
– Ces colis dépendent de la Banque Alimentaire qui est issue d’excédents de l’agro industrie, et de la grande distribution. 95% de la nourriture distribuée dans le cadre de l’aide alimentaire est industrielle.
Ce Système permet de distribuer aux pauvres des denrées destinées à être jetées.
Se pose aussi le problème de l’impact de cette alimentation polluée sur la santé: avec la question inquiétante des perturbateurs endocriniens. Le diabète, l’hyper tension, l’obésité provoqués par l’alimentation industrielle. Ces questions de co morbidité qui rendent l’impact des virus mortels pour toutes ces personnes aux organismes très affaiblis.
Notre volonté est l’accessibilité à une alimentation de qualité pour nous tous. La première qualité d’un produit étant son accessibilité ! Avec la question de la transformation nécessaire de nos rapports sociaux: sortir de la posture aidant/aidé, distinguer aide alimentaire intégrée au système, et mise en place d’une solidarité renforçant nos liens et la relation paysans/habitants des quartiers.
VRAC St Etienne. Nous avons assuré une première distribution en Septembre. Il a été possible à plusieurs familles de venir découvrir cet espace éphémère où nous avions soigné l’esthétique et l’accueil. Mais le prix coûtant reste encore trop cher pour beaucoup de personnes.
Le collectif de solidarité alimentaire pour tenter d’autres réponses. Il concerne une vingtaine de structures: des associations d’éducation populaire, des producteurs, des distributeurs, des restaurateurs.
Le projet : travailler ensemble, coordonner et mutualiser nos dynamiques.
– accès à des paniers solidaires avec la mise en lien des collectifs: les AMAPS, les Jardins d’Oasis, VRAC, Terrain d’Entente, Les brigades de solidarité….,
– collecte de fonds (prix arrondis, don des points de la carte de fidélité, invendus) dans les lieux de distribution qui développent cette pratique depuis un certain temps.
– Le parrainage à la Fourmilière, pour permettre son accès à d’autres coopérateurs avec un accueil à la manière de ce que développe ATD
– La dynamique de la Cantine Solidaire (portée par la Cantine Participative et les Brigades) avec une dynamique collective horizontale: certains bénéficiaires de repas participent également à leur confection.
– Initier des rencontres paysans/ quartier pour envisager des actions de solidarité.
Tous les acteurs investis dans le groupe solidarité alimentaire tentent depuis plusieurs années des approches en direction d’une alimentation de qualité accessible à tous. Cette visée reste à ce jour très limitée. Il est nécessaire de construire des approches et des actions croisées. Il est indispensable de développer ces mutualisations pour appréhender la réalité dans toute sa complexité.
Se nourrir, c’est un besoin mais aussi un droit. Le nombre de personnes en insécurité alimentaire est bien trop élevé pour faire reposer la réponse politique sur le secteur associatif. C’est d’une vraie politique de protection sociale qui inclut le droit à l’alimentation dont nous avons besoin. La sécurité sociale de l’alimentation.
II – Les réponses du quotidien.
Nous poursuivons nos temps de présence réguliers sur l’espace public, tout au long de l’année, de manière libre, inconditionnelle et gratuite. A partir de ces temps de rencontre, nous développons des actions. A force de tâtonnements, on trouve parfois des issues. Elles restent aujourd’hui extrêmement fragiles et incertaines. Voici les plus emblématiques
Avec les ados: Nous recherchons à diversifier les sources d’épanouissement et des expériences qui font sens pour ces jeunes en « galère »
Malgré les différents confinements et couvre feu, nous avons poursuivi nos temps de présence auprès des jeunes avec « le café des ados ». Environ dix jeunes nous rejoignent chaque semaine. Tout au long de l’année une quarantaine de jeunes sont venus au moins une foix.
Ces rencontres permettent d’élaborer ensemble des projets, d’identifier des difficultés, d’ouvrir d’autres espaces en se saisissant du tissu associatif local, d’assurer des accompagnements individualisés.
Nous avons pu réaliser cette année des démarches qui ont pu aboutir pour répondre à la demande d’une dizaine de jeunes dans leur parcours individuel. Des besoins très divers ont pu être pris en compte: recherche de stage, de formation, réorientation, Mission locale pour l’accès à la Garantie Jeune, lien avec la PJJ….
Des week-end et des vacances à Champoly se sont poursuivis avec les chantiers participatifs pour restaurer ce lieu « la Maison du Peuple » qui appartient à plusieurs collectifs. Des occasions de partager des temps où se croisent des personnes qui ne vivent pas les mêmes réalités. Ils ont concernés une trentaine de jeunes.
Le foot à 7 proposé par la FSGT2 va reprendre cette année 2021/2022. Soit 15 jeunes qui ont réalisé des démarches pour obtenir une licence.
La rencontre avec Rimbaud (Centre d’addictologie): Notre partenariat va pouvoir devenir effectif dès le mois d’Octobre avec les chantiers rémunérés, encadrés par des éducateurs de Rimbaud. 4 jeunes vont être concernés sur la première période. Ces chantiers pourront déboucher sur des suivis individualisés avec les personnes ressources du Centre. La présence d’un éducateur, au café des ados, est prévue d’ici Novembre.
Les enfants qui continuent à manifester leur souffrance d’écoliers. Le sport: reste un puissant vecteur de prise de confiance en soi, en l’autre et une source de compréhension du sens des règles de vivre ensemble.
Travail en partenariat avec Sport Autrement: 4 enfants poursuivent les entraînements; l’Ecole de Rugby du RCSE: 10 enfants ont été inscrits; « Vélo en quartier » avec l’apprentissage du déplacement en ville et les sorties en groupe: 24 enfants ont bénéficié de l’apprentissage, et ont réalisé au moins une sortie en dehors du quartier; Ecole de Hand: après une sensibilisation les Mardis après l’école sur le terrain de jeux, 6 petites filles sont inscrites dans le club depuis la rentrée scolaire.
Le développement des talents créatifs est également une ressource. Nous avons signé une convention avec la Comète qui va permettre aux familles à faible revenu de pouvoir inscrire ses enfants à des ateliers artistiques (musique, chant, danse). Nous comptons à ce jour 6 inscriptions. Un partenariat se développe avec le Centre Explora qui vient d’ouvrir ses portes pour proposer des activités d’éveil aux sciences et à l’expérimentation. Il est prévu des ateliers mensuels gratuits où des groupes de 4 à 6 enfants qui seront accompagnés par des mères de familles adhérentes.
Le soutien scolaire
Depuis le dernier confinement du mois de Novembre 2020, nous avons développer 3 temps pour accueillir les enfants d’âge primaire et les collégiens (une soixantaine d’enfants nous rejoignent tout au long de la semaine, avec un nombre d’adultes conséquent et compétents pour assurer cette présence). Nous n’imposons pas de contrainte d’inscription et d’horaire, un créneau de 2 heures est à disposition des enfants qui restent le temps nécessaire pour terminer et comprendre leur travail.
La répartition des adultes se fait en fonction des difficultés, si nécessaire un adulte pour un enfant. Chaque adulte s’efforce de s’adapter au mieux aux besoins, des temps de régulation d’équipe sont prévus à chaque période de vacances.
En l’espace d’un mois, nous avons noté des évolutions réelles pour plusieurs enfants qui ont repris confiance dans leurs capacités et qui retrouvent du plaisir à apprendre. Ils fréquentent de manière assidue ces différents temps. Leur participation est active, ils développent de l’autonomie dans la gestion du travail scolaire et respectent les règles établies. De nombreux parents et certains enseignants ont fait des retours positifs sur l’évolution de leur comportement.
La demande s’est intensifiée au fil des semaines, de plus en plus d’enfants réclament ces temps d’accueil et nous n’avons pas les moyens matériels et humains pour faire face à toutes ces demandes. Plusieurs mères de familles ont décidé de renforcer l’équipe cette année.
L’accès au numérique. Trop d’enfants scolarisés ne disposent toujours pas du matériel informatique indispensable. Nous sommes en lien avec le collectif Zoomacom pour rechercher à équiper toutes les familles demandeuse de matériel adapté.
Présence après l’école
Certains enfants ont besoin d’activités plus dynamiques quand ils ont terminé leur journée scolaire.
Temps de présence sur l’espace Jean Ferrat le Mardi après l’école, pour assurer un temps d’initiation aux pratiques sportives auxquelles les enfants n’ont pas accès.
Atelier RAP: en partenariat avec la Médiathèque a proposé 10 séances qui ont concernés une douzaine de filles et garçons d’ages différents.
Atelier argile sur les périodes de vacances scolaires avec Les Moyens du Bord, que nous avons pu reproduire 5 fois. 6 familles ont partagé ces séances: soit 6 adultes et 15 enfants.
Les femmes. Le café des femmes se poursuit avec la présence régulière de Latifa, pour l’atelier bien être. Un atelier art thérapie s’est mis en place et va se poursuivre à raison d’une fois par mois. Régulièrement, entre 10 et 25 femmes se rencontrent, soit 60 femmes nous ont rejoint au moins une fois dans l’année.
En préservant tout le plaisir que constitue le fait de se retrouver, et c’est premier dans toutes nos rencontres, des échanges se construisent, des projets s’élaborent, avec des manifestations publiques où nous avons de plus en plus d’opportunités de nous croiser, de nous parler avec d’autres, des femmes et des hommes dans nos diversités.
5 travailleurs sociaux du Conseil Départemental nous ont rendu visite pour entendre les difficultés des familles et expliquer leur rôle, les possibilités d’aide, les lieux spécifiques pour certains recours….16 femmes étaient présentes ce jour là. Nous espérons avec ce nouveau partenariat, pouvoir permettre aux familles d’oser franchir la porte de ces services qui leur sont dédiés, sans crainte de se sentir juger, sans honte d’évoquer les problèmes rencontrés. En se sentant légitimes de faire valoir des droits;
Depuis deux ans, ces femmes aspirent à vivre plus pleinement leur vie d’adultes. Alors qu’auparavant toutes nos conversations étaient centrées sur les enfants et l’intendance du quotidien!
Avec les sorties vélos organisées avec Vélo en quartier où 8 femmes participent régulièrement, des marches sur les voies vertes se sont organisées et vont se poursuivre. Elles concernent parfois des adultes, parfois des familles.
Nous étions 6 femmes à aller visiter le magasin coopératif « La Fourmilière », début Septembre, avec la perspective que des adhérentes puissent s’investir comme coopératrices.
III – Des actions exceptionnelles.
Participation à la journée internationale des droits de femmes.
Malgré les contraintes imposées par le protocole sanitaire, nous avons pris le parti de ne pas renoncer à nous manifester sur l’espace public. En lien avec d’autres collectifs de femmes, et le CREFAD, nous avons assuré deux manifestations: la lecture d’un conte sous forme de marche déambulatoire, dans un quartier voisin avec l’association « les voisines »; la lecture d’extrait de notre livre « La voix-e des femmes », sur l’espace Jean ferrat. Sur ces deux temps, 6 femmes de l’association ont contribué à l’animation, 20 étaient présentes.
Ces évènements ont débouché sur la création du « collectif du 8 Mars » avec la volonté de réaliser des évènements tout au long de l’année pour assurer une plus grande visibilité à la présence des femmes sur l’espace public. Une immense majorité d’associations se développent grâce à la présence massive des femmes. Il est temps qu’elles puissent bénéficier d’une plus grande considération.
Lettre pétition pour l’aménagement de l’espace public.
Nous avons réalisé une lettre pétition avec des pères de familles pour demander la restauration de l’espace Jean Ferrat: le terrain de foot qui est très endommagé, l’installation d’une fontaine, et la sécurisation d’une rue que les enfants traversent tout au long de la journée pour se rendre au parc et à l’école. Nous avons appris récemment que nos demandes allaient être prises en compte.
10 ans terrain d’Entente Nous avons été enthousiasmés ce 9 Juin 2021, de pouvoir accueillir autant de diversités. Beaucoup de représentants associatifs étaient présents (Vélo en Quartier, L’Amicale de Beaubrun, Sport Autrement, Les Moyens du Bord, La Fourmilière, VRAC, l’Amicale de Tardy, le Centre Explora, la Bricoleuse, Grandir en Oralité, la Fabrique de la Transition, des enseignants de la Pédagogie Freinet, le CDAFAL, La Fondation Abbé Pierre) une cinquantaine de familles du quartier ont partagé l’après midi, soit une centaine d’adultes se sont rencontrés tout au long de l’après midi. On a fait ce jour là société tous ensemble. Une dizaine de femmes s’étaient mobilisées pour assurer l’organisation de cette journée.
Un remerciement particulier à Amel qui a apporté une contribution très précieuse dans la réalisation du diaporama, du film où des enfants et des femmes témoignent de ce que représente aujourd’hui, Terrain d’Entente dans leur vie. Elle a filmé tout au long de la journée les différentes interventions. Nous allons tout mettre en oeuvre pour que notre site trouve la capacité à diffuser tous ces précieux documents.
Une partie de l’après midi a été consacrée à l’ouverture du Labo de co éducation. Frédéric Jésu, ancien pédopsychiatre de service public et impliqué en tant que consultant dans le champ des politiques sociales, familiales et éducatives locales, auteur de plusieurs livres entre autre: « Co édu-quer: pour un développement social durable » ; et Catherine Hurtig-Delattre, enseignante et formatrice, autrice du livre: « La coéducation à l’école, c’est possible » qui rapporte une expérience de 30 années d’ouverture de l’école aux familles et aux associations ont apporté leur contribution.
Nous avons fait l’expérience d’un échange en plusieurs groupes pour tenter d’identifier les différents acteurs de l’éducation. Les habitantes du quartier, et tous ceux issus des différents collectifs ont contribué ensemble à ce temps de réflexion. La famille et l’école ne suffisent pas pour prendre en compte les différents besoins des enfants tout au long de la journée, de l’année, il est temps d’imaginer la meilleure façon de construire des liens pour que tous ces acteurs travaillent ensemble.
Des amis nous ont rejoint sur le terrain pour proposer un riche après midi aux enfants. Notre ami Aldérick avec les rollers, l’association Sport Autrement pour un atelier boxe. Simon de la Médiathèque avec les réalisation d’instruments de musique à partir de la récupération de déchets
Une atmosphère joyeuse et festive avec un engagement volontaire de toutes les personnes présentes qui ont expérimenté le lancement de ce Labo de co éducation. Un résultat vraiment encourageant.
Une action est en cours avec un Bailleur public. Des problèmes récurrents de propreté sont à déplorer depuis plusieurs années sur les espaces collectifs: les allées, les escaliers, les étages. Hors les locataires payent des charges importantes, en constante augmentation. Nous sommes en période de crise sanitaire, la désinfection quotidienne des espaces collectifs est indispensable pour assurer la protection des locataires. Cette situation devient intenable pour les locataires. Certains renoncent à inviter des proches parce qu’ils craignent de s’affronter à des jugements en mettant à nue leur condition de vie indigne. Beaucoup cherchent à déménager.
Il y a quelques mois le Toit Forézien a été mis en demeure par le service sanitaire de la ville. Il était dans l’obligation de mettre en place un isolant adapté pour protéger les appartements qui étaient contigus au local à poubelles. Aucun travaux n’ont été réalisés jusqu’à ce jour.
Un dossier se constitue avec la signature d’une lettre pétition de tous les locataires concernés, des prises de photos, l’appui de l’ADILE.
IV- Les perspectives.
Condition de travail des femmes de ménage. Ce travail indispensable à toutes les entreprises, institutions, structures, est de plus en plus externalisé. Les conditions pour l’exercer deviennent d’autant plus précaires. Les préjudices humains, que ce soit sur le plan physique, psychique et social sont considérables.
Un travail en lien avec la LDH depuis quelques années va pouvoir aboutir à différents évènement en Décembre 2021, de manière à dénoncer ces pratiques indignes.
Projection du film « les Quais de Ouistreham » de Florence Aubenas, rencontre débat autour du livre « Deux millions de travailleurs et des poussières » en présence des deux auteurs, une rencontre avec les donneurs d’ordre pour revendiquer des conditions de travail plus dignes.
Atelier cuisine avec Les Moyens du Bord. Nos liens avec cette association se développent au fil des années. Des femmes volontaires vont initier à l’art de la cuisine des adhérents des MDB, à raison d’un Mardi par mois. De façon à ce que la cuisine devienne un plaisir partagé. Le repas réalisé collectivement sera partagé entre tous avec la présence des enfants.
Soutien à l’action du LAPE (lieu d’accueil parents / enfants) ouvert par l’Amicale de Beaubrun. Nous espérons pourvoir renouveler des temps d’accueil à destination des tout petits (2 / 3 ans) afin de pallier les difficultés d’accès au langage de certains enfants.
Comité de pilotage. Nous avons partagé notre première rencontre le 1er octobre. Il a rassemblé les salariés, des bénévoles « permanents » et 6 habitantes du quartier. Il a été l’occasion d’établir ensemble notre feuille de route.
Temps de formation prévus entre l’équipe salariée et les bénévoles, les habitants pour mutualiser nos pratiques et construire une culture commune sur la démarche de la pédagogie sociale; à chaque période de vacances scolaires.
Partenariat avec la Fondation Abbé Pierre, des subventions sous forme de micro projets vont être envisagées. L’objectif est de renforcer la capacitation de tous, les adultes, les jeunes et d’engager notre collectif dans une dynamique de réalisation de projets concrets, à partir de l’initiative des habitants.
La Fabrique de la Transition où nous contribuons, avec plusieurs structures collectives du bassin stéphanois, de façon à mutualiser nos moyens, à mieux diffuser la culture de la coopération, à amplifier nos liens pour mener de nouveaux projets et faciliter l’émergence de nouveaux acteurs. Nous sommes ainsi associés à ces structures porteuses de vitalité, d’ouverture et d’actions transformatrices.
D’autres partenariats se développent au fil des années:
– Nous apportons notre contribution au le Forum de la Précarité organisé par « Changer de Cap »,
– Nous allons participer avec 5 femmes, à la Nouvelle Université Populaire initiée par le collectif « Parlons en » à Grenoble,
– Nous allons participer à un écrit collectif avec le GPAS et d’autres structures sur la question de « l’aller vers ».
Nous espérons une réponse positive à notre demande de financement au Conseil départemental.
Un entretien préalable avec ce service, nous a permis de prendre contact avec la chargée de Mission du Plan Pauvreté, Précarité qui estime que notre démarche est conforme aux attendus de ce plan. Une rencontre est prévue ces prochains jours pour envisager une prise en compte de notre travail.
Nous remercions les membres du CDAFAL qui mettent à disposition leurs locaux, ce qui rend possible la poursuite de tout ce que nous développons. Ils assurent depuis 3 ans une aide substantielle à nos départs en vacances grâce aux chèques vacances.
Nous remercions la Fondation Abbé Pierre dont l’appui précieux nous permet de poursuivre la route.

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LE PROJET VRAC : une alimentation de qualité accessible à tous.

Au vu de l’impact de l’alimentation et de sa production sur notre santé et sur la nature, au vu de l’intérêt manifesté sur cette question par une majorité d’habitants des milieux populaires, au vu de leur impossibilité majeure à y avoir accès, Il est nécessaire de développer un cadre qui rende accessible pour tous une alimentation de qualité, issue d’une production écologique. L’objectif est de construire une dynamique qui engage chacun d’entre nous à en devenir partie prenante.

Le projet VRAC Saint-Etienne (Vers un Réseau d’Achat en Commun) est issu d’une réflexion partagée de différents acteurs et associations d’habitants du territoire stéphanois, posant le constat d’inégalités persistantes d’accès à une alimentation de qualité, malgré le développement de nombreuses initiatives locales en la matière. La situation très précaire de certaines familles est l’explication essentielle de leur absence de participation concrète.

En passant par le groupement d’achat, l’association VRAC Saint-Etienne vise à offrir la possibilité aux habitants des quartiers de se réunir pour commander à prix coûtants, des produits biologiques, écologiques et locaux,  répondant ainsi aux enjeux sociaux et environnementaux actuels.

Cette démarche s’attache à placer au centre l’équitable accessibilité des produits pour les familles et la rémunération des producteurs. Il est indispensable de reconnaître à tous le droit à une alimentation de qualité et la possibilité pour ceux qui nous nourrissent de pouvoir vivre dignement de leur travail.

Cette démarche ne deviendra réellement soutenable et transformatrice, que si nous posons d’emblée la question financière pour les ménages et la rétribution juste des agriculteurs. Pour l’accès de tous à une alimentation saine et locale il est indispensable de sortir des différentes formes d’aides alimentaires humiliantes. Dans différents espaces de réflexion, et de réalisations concrètes de solutions alternatives, on envisage cette question sous l’angle de la sécurité sociale alimentaire.

NOS CONSTATS

Le coût de la nourriture reste une préoccupation permanente des familles aux faibles revenus. Il est très fréquent que les foyers renoncent à une alimentation de qualité par manque de moyens financiers. 

Certaines dynamiques engagées  permettent d’affirmer qu’il est indispensable d’aller à la rencontre des gens, d’être présents sur les territoires pour rendre possible des actions transformatrices. La précarité est un vécu si contraignant que la tendance pour une personne qui la subit est de renoncer à des droits fondamentaux comme l’alimentation de qualité, l’accès à la santé, à la culture…    

 CE QUE NOUS PROPOSONS

– L’association VRAC favorise le développement de groupements d’achats de produits de qualité (biologiques, équitables) *dans les quartiers prioritaires de la Politique de la Ville* (à discuter). En partageant des valeurs communes de solidarité, de justice sociale et alimentaire et de valorisation de produits de qualité et de leursproducteurs, l’objectif est d’offrir l’accès du plus grand nombre à des produits de consommation courante de qualité à prix accessible.

Elle se base sur l’implication des adhérent.e.s dans le fonctionnement de leur groupement d’achat : il s’inscrit dans une visée émancipatrice de réappropriation de l’alimentation. L’objectif est de créer des rencontres qui produisent du plaisir partagé et non de l’anxiété autour des questions d’alimentation, de santé et d’environnement.

Au sein des groupements, les prix sont raisonnables grâce à :

– la commande de produits en grande quantité à des producteurs engagés;

– la réduction des coûts intermédiaires en priorisant les circuits courts et en réduisant les emballages superflus;

– la vente à prix coûtant et sans marge.

– Des membres de l’association organiseront chaque mois la prise des commandes dans les lieux de permanence physique avec tous les habitants volontaires, complétées par des commandes passées en ligne sur la plateforme cagette.net. Une douzaine de jours plus tard, ils livreront les produits sur chaque point de distribution sur une demi-journée. Des événements conviviaux « autour de la cuisine », avec les habitants, seront aussi proposés régulièrement.

– Il s’agit de s’appuyer sur les dynamiques de collectifs déjà engagés dans la distribution des produits issus de l’agriculture paysanne locale et sur les structures de proximité impliquées dans la vie des quartiers de façon à mutualiser les ressources et faire converger les enjeux.

– Les produits du groupement d’achat incluront des produits alimentaires en vrac (huile d’olive, farine, chocolat, sucre, fruits secs, riz, pâtes, légumineuses…), des produits d’épicerie transformés (jus de fruits, compotes, café, thé, confitures, miel, purée de tomates…) produits d’hygiène (shampoings et savons, crèmes, dentifrices, lessive…),  et des produits frais locaux (fromages…).

– Les produits seraient vendus à prix coûtant aux habitants des QPV. Une cotisation solidaire peut s’appliquer pour les adhérents habitants hors-QPV, qui doivent pouvoir participer au projet sans devenir majoritaires parmi les adhérents : la priorité d’adhésion au groupement peut être donnée aux habitants des QPV. 

– L’association devra solliciter la participation et l’engagement des collectivités locales et des bailleurs au projet à sa gouvernance et leur financement dans l’objectif de soutenir un poste de départ et des frais de fonctionnement. Les distributions et prises de commandes ayant lieu dans les centres sociaux et structures de proximité souhaitant mettre à disposition des salles, il n’y aurait pas de loyer à payer pour les distributions.

Publié par Terrain D'entente dans 2021, Chanson, Travail sur la question alimentaire, 0 commentaire

Pour une alimentation digne pour tous.

Terrain d’Entente a contribué à l’émergence de VRAC (Vers un Réseau d’Achat en Commun) sur le quartier de Tarentaize/Beaubrun.

Ce projet est issu d’une réflexion entre différents acteurs de terrain, notamment :

– « De la Ferme au Quartier » qui développe depuis 10 ans la dynamique des AMAP dans les quartiers. Son projet social initial était de rendre accessible cette distribution de paniers aux personnes à faibles revenus.

– « La Fourmilière », supermarché coopératif, qui souhaite que cet espace permette l’implication de tous, sans discrimination. Le coût des aliments, les parts pour devenir coopérateur, sont estimés de façon à limiter au maximum les freins à la participation.

– « Terrain d’Entente » dont un de ses objectifs est de réfléchir aux conséquences sociales de la pauvreté et à la manière de les faire reculer.

Une rencontre entre des membres de la Fourmilière et des adhérentes de Terrain d’Entente a mis en évidence une préoccupation et une volonté partagées de favoriser une alimentation de qualité pour tous, qui contribue à une meilleure santé et à la préservation de l’environnement. Malgré tout, depuis l’ouverture du magasin, et différentes tentatives pour organiser la découverte de cet espace, aucun.e habitant.e n’est devenu.e coopérateur.rice.

La situation très précaire de ces familles est l’explication essentielle de leur absence de participation concrète. Les dynamiques engagées par Terrain d’Entente sur le quartier permettent d’affirmer qu’il est indispensable d’aller à la rencontre des gens, d’être présents sur les territoires pour rendre possible des actions transformatrices.

La précarité est un vécu si contraignant que la tendance pour une personne qui la subit est de renoncer à des besoins fondamentaux comme l’alimentation de qualité, l’accès à la santé, à la culture…

D’autres structures ont rejoint VRAC pour s’y investir concrètement: L’Amicale Beaubrun, le centre social le Babet, l’AMAP de Beaubrun,

Nous sommes d’accord sur ces constats: Le coût de la nourriture reste une préoccupation permanente des familles des milieux populaires. Il est très fréquent que les foyers renoncent à une alimentation de qualité par manque de moyens financiers.

Or les prix « coûtants » affichés sur le catalogue VRAC restent pour beaucoup de familles inaccessibles. Les familles les plus pauvres ont été gravement impactées par les conséquences des confinements successifs, elles se retrouvent pour beaucoup surendettées. De plus en plus de personnes sont contraintes de faire appel à l’aide alimentaire.  La volonté de Terrain d’Entente est de rendre accessible à tous ce qui est indispensable à une existence digne. La possibilité de pouvoir subvenir aux besoins élémentaires, et également de choisir une alimentation de son choix nous semble être des objectifs à ne jamais perdre de vue.

Nous recherchons sans relâche, des solutions pour assurer à tous cette possibilité.

Terrain d’Entente a donc initié une rencontre pour engager différents acteurs avec VRAC 42, pour se questionner ensemble sur cette réalité très prégnante à St Etienne de situations de grandes précarité qui ne cessent d’augmenter. Les Brigades de solidarité, La Fourmilière, le réseau des AMAPS, la Fabrique de la Transition, De la Ferme au Quartier se sont rencontrés  fin décembre 2020.

Tous ces collectifs sont investis sur la question de l’alimentation et s’engagent dans des actions qui se déclinent de manière très différente.

Les Brigades de Solidarité ont pris le parti de s’adresser à tous ceux qui ne sont pas pris en compte dans les différents dispositifs d’aide alimentaire. Ils se sont organisés depuis le premier confinement pour repérer les personnes en demande d’aide, récolter des dons et les distribuer régulièrement.

La Fourmilière assure, auprès des coopérateurs, une collecte de denrées qui sont destinées à plusieurs lieux de solidarité dont  les Brigades.

Depuis sa fondation, ce marché coopératif à la volonté de rendre son accès possible pour tous. Son mode de fonctionnement particulier avec ses contraintes sont un élément d’explication de l’absence de coopérateurs issus des quartiers populaires.

Terrain d’Entente depuis plusieurs années s’interroge sur les meilleurs conditions possibles pour rendre une alimentation de qualité accessible à tous. Des liens se sont construits avec la Fourmilière, nous avons contribué à l’émergence de VRAC. Nous poursuivons nos recherches.

Les AMAPS, depuis plusieurs années s’interrogent sur les questions d’accessibilité alimentaire. Différentes tentatives pour constituer des paniers solidaires ont été réalisées, en lien avec d’autres structures comme le Secours Populaire, les producteurs (concernant les invendus).

De la Ferme au Quartier recherche un mode d’organisation financière pour rendre accessible ses produits. Un lien se construit avec les Brigades pour tenter un fonctionnement en réseaux avec les producteurs.

VRAC 42  se trouve à la croisée de tous ces chemins, de ces différents constats de l’immense difficulté à pouvoir rejoindre ceux qui sont aujourd’hui condamnés à consommer des produits que nous pouvons estimer dangereux, pour la santé, pour l’environnement, et dont le mode de  production met en péril l’agriculture paysanne.

La Fabrique de la Transition s’est constituée pour générer de la coopération sur les projets. Elle a contribué à la constitution de VRAC 42

Ce qui  est commun à tous ces collectifs, c’est essentiellement la question de la justice sociale, de l’accès à l’alimentation pour tous. Notre volonté est de s’adresser à ceux pour lesquels rien n’est accessible, qui ne sont pas partie prenante de tous ces réseaux. Nous sommes confrontés  à l’urgence sociale pour tous ceux qui n’ont pas de quoi se nourrir au quotidien, à l’urgence sanitaire pour tous ceux qui sont contraints à une alimentation polluée et à l’urgence environnementale, avec l’enjeu de la production alimentaire (comment sortir de la logique de l’agro-industrie et de tout son cortège d’aides, avec la  banque alimentaire comme variable d’ajustement, comment soutenir une agriculture paysanne viable pour les producteurs?)

L’urgence sociale est une question immédiate avec une organisation en réseau qui est déjà effective et qu’il faut amplifier : donner accès à de la nourriture pour tous ceux qui n’en n’ont pas les moyens d’une manière digne (l’accès aux colis alimentaires impose aux « bénéficiaires » des justifications humiliantes).

Le problème essentiel des différents « dispositifs d’aide alimentaire » est qu’ils maintiennent ceux qui y ont accès dans un statut de demandeurs de manière souvent définitive et construit un système de dépendance, de sélection et d’exclusion.

Le recours aux aides d’urgence devrait être un moment exceptionnel dans  l’existence, pour qu’ensuite chacun puisse avoir accès à des ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins vitaux.

Tout en poursuivant les actions de solidarité et d’entraide, nous sommes confrontés à la question de notre contribution à ce que chacun puisse se nourrir  correctement et de manière digne, puisse choisir sa nourriture en fonction de ses goûts et habitudes pour une démocratie alimentaire.

Il y a nécessité de construire une réflexion et des démarches transformatrices qui prennent en compte les besoins vitaux en tant que droits universels et apportent des réponses pour pallier  aux catastrophes environnementales.  Un travail est en cours et que nous pouvons rejoindre sur la construction d’une sécurité sociale de l’alimentation, les engagements des communes sur le maraîchage…..

L’objectif est de prendre en considération les besoins sur toute la commune de St Etienne, l’organisation de l’alimentation sur tout le territoire, et de permettre une connexion entre les différents énergies pour tenter de  coordonner les dynamiques.

Nous aimerions construire une réflexion avec les  producteurs, les distributeurs pour rechercher un mode d’organisation qui nous permette de définir collectivement ce que nous voulons manger, comment on le produit, de façon à ce que ceux qui nous nourrissent puissent vivre dignement et comment en assurer l’accès à tous. Dans un premier temps, nous envisageons de tenter de construire une caisse de solidarité qui permette à chaque stéphanois de consommer le plus possible de la qualité.

Le lien avec la Fourmilière et la Ferme au Quartier vont nous permettre de mettre en synergie producteurs, distributeurs, transformateurs, clients, et faire des propositions de solidarité (prix arrondis, points de la carte de fidélité à destination des collectifs, systèmes de « prix cassés »)

Nous souhaitons engager d’autres collectifs à nous rejoindre.

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Appel aux dons 2020

Nous lançons aujourd’hui notre appel aux dons 2020, vous pouvez y accéder en suivant ce lien sur Helloasso:

Propulsé par HelloAsso

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Lorsqu’on a moins de droit que les autres, comment accepter d’avoir les mêmes devoirs?

« Ha ça, c’est sûr, ça serait bien que le goûter devienne un temps de partage! »

C’est un jeune de 14 ans qui parle ainsi. Il a des pépites dans les yeux quand il évoque cette perspective.

C’était au début de nos rencontres aux pieds des immeubles, à l’occasion de nos premiers ateliers de rue les samedis après midis. Notre premier goûter avait été catastrophique, les chocos avaient volés, certains même piétinés dans la précipitation des jeunes  à réclamer leur part!

A l’époque, nous nous adressions essentiellement à des garçons adolescents qui nous ont rapidement encouragés à revenir pour construire ensemble ces temps de « partage ».

Au début de nos rencontres, les coups et les insultes pleuvaient. Mais chaque fois que nous savions nous interposer dans ces rudes bagarres, en y accordant le temps nécessaire, les maux savaient s’exprimer, on apprenait ensemble à trouver les mots justes pour donner du sens à ces colères explosives. Ils nous ont rapidement sollicités pour intervenir dans ces conflits. Ils ont fini par nous demander de venir plus souvent et de rester plus longtemps.

De ces jeunes dont on parle trop souvent avec un discours empreint de crainte, de mépris, d’une multitude de présupposés qui ne sont jamais vérifiés mais toujours affirmés avec conviction. On leur reproche d’être à l’origine de tous ces désordres sociaux, ces incivilités qui nous les font rapidement considérés comme délinquants.

Moins on a de relation, d’expériences partagées, moins on a de connaissance, et de compréhension. S’ouvre à nous alors un champ très libre pour les phantasmes générateurs de peurs et de rejets. Cette tendance facile à penser de façon simplifiée et schématique.

Il faudrait donc les éduquer! Instaurer fermement  des règles pour apprendre « le cadre » à ces jeunes qui ne respectent rien ni personne »! Un « cadre »  posé de façon autoritaire et strict pour leur apprendre les rudiments des règles du vivre ensemble. On voit qu’ils crachent par terre, qu’ils profèrent des insultes, qu’ils narguent les adultes.  

Mais qui fait l’effort de connaître un peu la réalité de leur quotidien? Qui s’interroge des conséquences de cette vie de galères?

Un jeune que je rencontrais régulièrement en prison me posait un jour cette question. « Comment on fait quand on est une famille très pauvre, qu’on a été nul à l’école, ,qu’on vit dans un quartier où il y a de la violence, de la délinquance? »….

Qui est capable de répondre?

Comment on fait quand les collèges excluent des collégiens pendant plusieurs mois et qu’ils précisent qu’ils n’ont plus rien à faire dans un établissement scolaire? Comment on fait quand on a raté plusieurs semaines d’école suite à une situation familiale explosive et qu’il n’est pas possible d’envisager le redoublement parce qu’il y a trop d’élèves par classe?! Comment on fait quand on a 11 ans, et qu’il est indispensable de contribuer à l’organisation familiale dès la première heure du jour et qu’on reçoit des sanctions et des menaces d’éviction scolaire parce qu’on arrive en retard à l’école? Comment on fait quand les structures du quartier organisent un départ en vacances pour 7 alors qu’on est 40 à l’espérer? Comment on fait quand on démultiplie les démarches de recherche d’emploi et que c’est toujours « non »?

Qui peut répondre?!

Ils sont pourtant nombreux, les chercheurs, les intellectuels à nous proposer des pistes pour comprendre et tenter de trouver des  manières adaptées de répondre. Parce que la responsabilité de toute la communauté éducative est de chercher d’abord et sans relâche, à comprendre ce que manifestent ces jeunes!

Fernand Deligny (1) a été l’un des pionniers pour rechercher sans relâche ce qui dans son propre comportement empêchait que la rencontre se produise, que le lien se construise. C’est d’abord ça le travail éducatif, considérer ses propres limites et défaillances pour mieux cheminer avec l’autre, pour se laisser transformer par ses attitudes qui peuvent nous déconcerter, provoquer un sentiment d’insécurité. Pour rejoindre sa souffrance et tenter de là traverser avec lui.

Christophe Dejours (2) nous invite à nous laisser coloniser par le doute. Parce que « le réel se fait connaître par l’échec« , parce que « la souffrance guide l’intelligence« .

Dans un entretien sur la question de la violence des banlieues, Christophe Dejour répond « la violence du non travail »!

L’accomplissement de soi dans le champs social, passe par le travail. Inscrire notre existence dans la société passe par le travail et la reconnaissance de notre contribution à l’intérêt commun. Pour ces jeunes, il n’y a plus d’espoir d’apporter cette contribution à la société, ce qui pourrait les inscrire dans la communauté des hommes. Ils sont privés de la possibilité d’espérer le travail.

Pour supporter cette situation, résister à cette souffrance de se sentir exclus, certains s’efforcent d’organiser des stratégies de défense. Il s’agit pour eux de renverser le rapport au travail. Ils inversent cette humiliation d’être récusé du rapport au travail dans l’affirmation que rien n’est plus humiliant que d’accepter de travailler.

Cette attitude de défiance se construit dès l’école. Les difficultés d’apprentissage, les efforts très contraignants sont possibles à condition que se profile la promesse d’une émancipation grâce au travail. Pour eux, le travail scolaire devient donc le symbole de ce qu’il faut rejeter. Ne pas se soumettre à la discipline, s’opposer au travail scolaire, à l’enseignant, à tout ce qui représente ce qu’il est interdit d’espérer pour eux même.

Ce rapport d’humiliation du fait de l’exclusion produit des comportements par lesquels ils s’endurcissent pour supporter tout ça: il faut devenir insensible à toute forme de message qui rappel le rejet. Est un homme celui qui est capable d’assumer la souffrance et de l’infliger à autrui. Tout ce qui représente cet ordre qui ne leur laisse aucune place est la cible de leur haine. L’ennemi est tout ce dont on est définitivement privé. C’est une idéologie défensive, une exaltation de la violence comme valeur. Ils ne sont pas victimes du système, ce sont eux désormais qui vont faire peur et qui vont humilier. Etant exclus de toute participation aux règles de la collectivité, ils rentrent dans « un rapport de force » et non plus un rapport de droit. Le « rapport de droit » est d’avance perdu pour eux tout le temps et partout.

Christophe Dejours estime que nos réponses sont inadaptées, inopérantes. Du côté de l’action sociale, l’objectif des éducateurs est d’attaquer ces défenses pour les déconstruire, ce qui amplifie d’autant la radicalisation de ces défenses.  La réponse sécuritaire et répressive ne fait également qu’aggraver les choses. La terrible dérive de ces réponses est de n’avoir bientôt que l’armée comme solution pour aller cogner sur ces gosses afin de les mater.

Il faut retrouver les voies qui permettraient à chacun d’apporter sa contribution à la vie sociale par le travail. »La centralité du travail est vitale pour chacun. »

Ceux qui échouent à l’école sont les exclus de demain. 1,9 millions de jeunes sont ni en emploi, ni en formation, ni en recherche, ni en accompagnement. Comment  peuvent-ils s’insérer? Notre pacte républicain est en danger si on ne réduit pas ces écarts: lorsqu’on a on moins de droits que les autres, comment peut on accepter d’avoir les mêmes devoirs?

« La coopération, l’explication, la compréhension sont une plus grande source de réussite que la compétition, le langage des initiés. Il faut une école inclusive avec un système d’évaluation qui encourage. Promesse d’une élévation du niveau pour tous, ce qui n’est jamais du nivellement par le bas.

Pour le vivre ensemble en société, il faut scolariser ensemble toute la jeunesse. L’école, c’est le temps du commun. » (Jean Paul Delahaye) (3)

Terrain d’Entente est engagé sur cette question de l’école. Les enfants des milieux populaires souffrent à l’école parce qu’il n’y a pas suffisamment de prise en compte et d’effort de compréhension de leur réalité. Le corps enseignant a la responsabilité de l’ouverture de l’école sur le quartier, de l’organisation de la rencontre avec les familles. Mais cette institution ne peut pas réaliser ce travail seule et de manière isolée.  
Nous souhaitons engager  un chantier, dans la durée, pour rechercher comment offrir les meilleurs conditions pour construire une communauté éducative qui assure de manière effective notre responsabilité collective dans l’éducation et la protection des enfants et des jeunes, avec les différents acteurs du champ éducatif, les parents. C’est une condition incontournable pour permettre à chaque enfant de faire des liens entre les différents espaces dans lesquels il évolue et de trouver ainsi du sens et de la cohérence dans les apprentissages organisés de manière différente à l’école, en famille, dans le milieu associatif.

Les enfants dont la structure familiale ou  sociale a été brisée peuvent devenir créateurs si on leur donne un lieu de parole, autant qu’ils peuvent devenir délinquants quand leur énergie ne trouve aucun lieu d’expression. Terrain d’Entente cherche à offrir une structure affective et sociale autour de ces jeunes. Nous prenons le risque de nous laisser déstabiliser, jusqu’à nous sentir parfois avec eux, à la limite du danger et nous puisons ensemble d’impressionnantes ressources. Il faut pour cela endurer les nombreuses expériences d’échec, et s’obstiner à ne pas lâcher. Il est nécessaire de développer une attitude de bienveillance et de compréhension. Nous mobilisons toute notre énergie pour créer un climat apaisant pour accueillir ces tempéraments tendus, blessés, hyper réactifs. On sanctionne le moins possible, on accueille, on  écoute, on s’efforce de comprendre.

Ainsi, ces mêmes jeunes ont su se saisir de l’opportunité que leur offrait un nouveau dispositif, le Fond de Participation des Habitants, qui aide au financement de différentes actions. Ils ont rédigé un projet de départ en vacances, et préparé ensemble la rencontre à la commission d’admission pour expliquer leurs motivations. Ils souhaitaient partager quelques jours entre copains. Ils se sont saisi de la seule opportunité que nous pouvions leur offrir: une semaine à la Ferme des Fromentaux, en Haute Loire.

Pour ces jeunes, ce séjour a été « une première fois » sur de nombreux aspects. La vie dans une ferme, le travail du quotidien, la « rencontre » avec la nature….

Malgré cet aspect déstabilisant, ils ont eu, durant tout le séjour, une attitude coopérative et positive.

Ils se sont intéressés aux activités, (conduite du tracteur, traite des chèvres….). Ils ont participé à toutes les tâches ménagères (repas, vaisselle, rangement) qu’ils avaient eux mêmes organisé en se répartissant le travail à partir d’un tableau qui établissait des tours de rôle.  Ils ont respectés les horaires qu’on avaient décidé avant le séjour. Ils ont eu un très bas niveau d’exigence concernant les activités, s’inquiétant du coût et des possibilités de l’association. Les soirées ont été l’occasion d’échanges authentiques autour de leurs préoccupations.

Aujourd’hui, ces jeunes ont souhaité organiser un « café des ados », un lieu pour se retrouver avec une présence adulte pour les accueillir .

Aujourd’hui les structures sont nombreuses à investir beaucoup d’énergie pour dénoncer le danger des écrans et faire des campagnes de prévention, de sensibilisation pour apprendre les  bonnes pratiques. Sachant que les écrans sont pour beaucoup la seule source de plaisir qui est vécue dans la solitude, sans aucun garde fou, les structures du quartier que nous avons sollicitées pour organiser ensemble cet accueil, nous ont toutes répondus:  « on ne peut pas tout faire! »

Nous avons donc ouvert ce café et une trentaine de jeunes nous rejoignent chaque jeudi. Nous réfléchissons ensemble à différents espaces pour discuter, se divertir. Des projets se pensent. Tout semble possible, mais un problème se profile: nous ne sommes que deux pour les accueillir! Nous risquons rapidement de toucher nos limites pour tenir cet accueil dans la durée.

Notre détresse à nous, c’est d’être trop peu nombreux, et de disposer de moyens insuffisants  pour construire une action à la hauteur des aspirations de ces jeunes qui réclament juste un peu d’espace et d’attention.

                                                                                    Josiane GUNTHER Mai 2019

(1) Fernand Deligny, né en 1913, une des références majeure de l’éducation spécialisée

(2) Christophe Dejours, psychiatre, psychanalyste et professeur de psychologie français, spécialiste en psychodynamique du travail et en psychosomatique

(3) Jean Paul Delahaye, Inspecteur général de l’éducation nationale honoraire. Ancien directeur général de l’enseignement scolaire.

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Pour retrouver notre légitimité et sortir ensemble de l’impasse.

          

Notre cheminement à Terrain d’Entente nous a permis, au fil des années, de faire des rencontres improbables. Nous pouvons envisager aujourd’hui d’initier des évènements, pour tenter de construire des espaces différents avec d’autres collectifs et répondre à  des questions de société qui dépassent les préoccupations quotidiennes de notre territoire et qui font tomber certaines frontières.                                                                                                                                Nous sommes sollicités sur des questions diverses, avec comme postulat de tenter de construire collectivement une démarche qui soit transformatrice, qui apporte un changement, qui recherche des alternatives.                                                                                                 Pour citer celles qui nous portent particulièrement aujourd’hui.

Le super marché coopératif, la « Fourmilière » vient d’ouvrir ses portes à St Etienne.  Un nouvel espace pour promouvoir l’agriculture paysanne, respectueuse de l’environnement, qui privilégie les circuits courts. Les coopérateurs construisent un mode d’organisation où chacun prend part aux décisions et se sent responsable des principes déclarés.  Les fondateurs de cette démarche sont venus solliciter les adhérentes de Terrain d’Entente et nous ont invité à prendre part à leur réflexion. Ils souhaitent poursuivre l’organisation de ce travail en comptant sur notre contribution, afin que ce magasin corresponde à la grande diversité des habitants de notre ville en y intégrant, en tant que coopérateurs, des habitant-e-s de Beaubrun – Tarentaize.

Nous participons au bal populaire du 14 Juillet que le collectif « les cris du quartier » propose depuis quelques années. Une journée de fête ouverte à tous, où chacun apporte sa contribution. Nous avons été sensibles à cette invitation qui rassemble plusieurs associations qui interviennent dans différents quartiers. Toutes développent des démarches d’éducation populaire et réalisent des actions culturelles, sportives, citoyennes qui s’adressent à tous.

Nous avons initié un chantier avec les acteurs de la pédagogie Freinet sur la co éducation depuis 2 ans.

Trop de jeunes sont ni en emploi, ni en formation, ni en recherche, ni en accompagnement. Notre pacte républicain est en danger si on ne réduit pas ces écarts: lorsqu’on a on moins de droits que les autres, comment peut on accepter d’avoir les mêmes devoirs?

La première démarche pour assurer les conditions du bien être à l’école est de l’ouvrir aux parents, de favoriser la co éducation, pour une meilleure connaissance réciproque.

Construire une communauté éducative qui assure de manière effective notre responsabilité collective dans l’éducation et la protection des enfants, et leur permettre ainsi de trouver du sens et de la cohérence dans les apprentissages organisés de manière différente à l’école, en famille, dans le milieu associatif….

Une toute dernière rencontre a eu lieu avec des militants de la LDH. Ils ont réalisé un travail de recherche sur la lutte contre les discriminations et l’accès aux droits pour tous. Ces militants souhaitent aller à la rencontre de ceux qui vivent des difficultés importantes pour faire valoir des droits et faire reconnaître les situations de discrimination.

Les amis de la LDH qui nous rejoignent se réjouissent de pouvoir travailler avec les membres de Terrain d’Entente sachant qu’on s’efforce collectivement de redresser ce qui ne va pas dans notre société. Ils souhaitent « entreprendre un  travail pour faire valoir les droits avec ceux qui savent prendre en main leur réalité« . (sic)

Quand on imagine la réalité quotidienne de toutes ces familles qui subissent un empilement de contraintes pour espérer assurer seulement des moyens de subsistance jour après jour, on peut se demander comment il devient possible de s’inscrire ensemble dans des démarches militantes. Comment il est possible de s’extirper de cette inquiétude permanente, de cette peur du lendemain? Comment on arrête de subir et de se méfier de ceux qui nous entoure?

Nous avons évoqué à plusieurs reprises, ce qui est préliminaire à la construction d’une relation de confiance, pour arriver à être moins centrés sur les problèmes à régler et s’engager peu à peu, avec d’autres, pour construire des projets qui répondent à des envies.                                    Mais là, nous avons franchi une autre étape. Nous ressentons aujourd’hui un peu de légitimité pour nous inscrire avec d’autres collectifs dans des actions qui espèrent avoir une portée transformatrice pour la société toute entière. Un engagement qui reste un pari, celui de pouvoir mobiliser l’énergie nécessaire qui est souvent absorbée par les « galères » du quotidien.

Pour ce qui concerne Terrain d’Entente, tout a commencé par la préoccupation du non départ en vacances et de la reconnaissance de ses lourdes conséquences pour les enfants et les familles. De plus en plus de familles ne partent pas en vacances. Il était temps de reconsidérer le droit aux vacances comme un enjeu social.

Nous avons beaucoup investi, avec nos moyens dérisoires, pour rendre possible des départs. Nous avons sollicité l’an passé différents réseaux pour créer un collectif sur l’accès aux vacances pour tous. Nous nous sommes engagés dans une réflexion pour penser ce problème dans sa dimension politique: comment on organise une réappropriation des vacances par les gens eux mêmes, qui ne soit pas du tourisme, en les construisant collectivement, de manière à reconstruire le tissus social, les liens d’entraide?                                                                                 La question du départ en vacances permet d’aborder les questions de l’environnement, de l’alimentation,  du respect de la terre et des populations. L’environnement et les inégalités sociales sont liées.

Partir s’est s’ouvrir à d’autres réalités,  aller à la rencontre de ceux qu’on ne connaît pas, sortir de nos cloisonnements et peu à peu, refaire société tous ensemble. Nous avons rechercher des hébergements amis, sensibles à nos questions, volontaires pour construire des collectifs qui se mobilisent sur des questions politiques pour sortir des cases où on nous a assigné. Pour identifier le temps des vacances comme lieu de fabrication de la société.

Ca à l’air de rien, les départs en vacances. Nous partons depuis quelques années rejoindre des amis paysans boulangers, éleveurs de chèvres en Haute Loire. Ces familles du quartier de Tarentaize, qui connaissent la peur du lendemain, la honte de leur condition, ont pris ce risque d’aller dans l’inconnu.                                                                                                                                         Notre point d’appui pour faire ensemble ce pas, a été les expériences positives que nous avons réalisées ensemble, à partir de nos discussions au café des femmes, de ce que nous avons pu mettre en commun, de cette communauté de vie qui est devenue peu à peu réalité pour certaines.                                                                                                                                                  C’est parce qu’on côtoie les gens dans le quotidien, qu’on côtoie l’intime de leur existence, qu’on peut construire des choses ensemble. Il s’agit toujours pour nous, de tenter de modifier les conditions politiques de l’existence, en partant du quotidien. Nous nous efforçons d’observer les micro évènements qui se manifestent et nous tentons de  les intégrer à nos analyses, à nos efforts de compréhension. Nous sommes très soucieux également, d’identifier la charge mentale de la vie quotidienne vécue par les familles, et nous avons le soucis de là partager en prenant en charge certains temps de la semaine avec les enfants, en réalisant ensemble les démarches incontournables.     

Les différentes actions que nous avons menées à bien, en affrontant ce qui est difficile, ont permis d’ introduire de la solidarité entre nous et avec les autres.

Et nos séjours à Retournac nous ont aidé à sortir de la peur et de la honte:                                                              « Ici on n’a pas besoin d’avoir peur, on ne ferme même pas la porte à clé, on se sent respecté tel qu’on est…. ».  

L’accueil chaleureux et inconditionnel de nos hôtes nous ont rendu le sens de notre respectabilité.                                                                                                                                Quand nous partons collectivement en vacances, nous construisons du dépaysement, nous ré enchantons la banalité du quotidien. Produire quelque chose ensemble reste fondamental pour avoir le sentiment de vacances, de dépaysement. Durant ces journées nous nous intéressons à toutes les opportunités de partage, parce que nous savons qu’elles sont créatrices de construction de liens. Quand nous essuyons tous ensemble la vaisselle, nous partageons un moment de convivialité singulière qui prend une part dans la dynamique globale du séjour. Les repas peuvent devenir des moments de fête, de construction de savoirs faire communs, et des moments de conscientisation. Des occasions de faire apparaître des valeurs en partageant une pratique, en l’éprouvant.

A Retournac, nous avons pu faire ainsi l’expérience de ce qui nous lie, nos préoccupations communes, nos budgets très précaires (beaucoup de ces amis habitants de la ferme survivent aussi avec le RSA!) et de l’enrichissement de partager nos différentes façons de construire le quotidien, nos manières d’appréhender le réel à partir de nos valeurs, de nos croyances, de ce qui nous a construit. Nous avons réalisé ainsi un creuset, à la manière de ce récipient qui permet le mélange et qui  transforme les métaux en quelque chose de plus complet, de plus abouti, de plus précieux.

En passant par un lieu qui nous appartient ensemble, ailleurs que chez nous, il devient possible de se rencontrer et de faire du mélange. Il forme un point de rencontre, d’influence des cultures différentes. On déconstruit alors des peurs, et on construit des compétences sociales. Nous fabriquons ainsi des communautés qui peuvent s’étendre.

Ces séjours ont permis pour les membres de notre collectif, de vivre des expériences positives autour de l’organisation concrètes du quotidien où chacun arrive à contribuer à son bon déroulement. Ces réussites collectives sont devenues un appui considérable pour retrouver confiance et assurance. Aujourd’hui nous arrivons à nous saisir d’opportunités d’auto financement pour nous donner les moyens de poursuivre ces projets de départ en vacances. Le mode d’organisation pour faire des gâteaux, servir dans un salon de thé, vendre des crêpes devant la médiathèque…. devient  plus efficace et respectueux des forces et des possibilités des unes et des autres. La relation s’intensifie entre certaines et certains, les personnalités s’affirment d’avantage. Ce cercle vertueux favorise des partages de réflexions plus élaborés et ouverts aux enjeux de notre société.

Ces expériences de projection, de construction et de départs concrets en vacances ont été  renouvelées régulièrement, également dans d’autres espaces, avec d’autres collectifs. Elles nous permettent aujourd’hui de nous sentir plus légitimes pour renforcer les rangs de tous ces amis qui cherchent à construire autrement. Nous  espérons ainsi contribuer à bâtir un horizon d’égalité et d’intérêt commun, de façon à améliorer les conditions de vie de tous et à retrouver notre dignité.                                                                                                                               Tout reste extrêmement fragile, dans tout ce que nous entreprenons, et risque de basculer à tout instant.  Cet un exercice périlleux qui demande attention, constance, vigilance, mais c’est la seule manière de rester debout et de se sentir vivant. Nous nous donnons les moyens de pouvoir encore espérer.

                                                                                        Josiane GUNTHER Avril 2019

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Cacher la poussière sous le tapis.

                                    

C’est une expression qui décrit ce que nous ne souhaitons pas montrer, ce qui doit rester caché. Une façon d’imager ce qui fait honte, ce qui est estimé indigne, inavouable.

Dans notre collectif, au fil des semaines, des mois, des années nous découvrons peu à peu de quoi est fait le quotidien de nombreuses familles qui subissent et supportent la précarité. Parmi ce qui alourdit fortement  la marche de tous ceux là,  il y a pour l’essentiel une grande difficulté à accorder sa confiance, à prendre le risque de rencontrer les autres, ceux qu’on ne connaît pas, d’oser une parole. Il n’est donc pas question d’oser dire et partager ce qui est vécu douloureusement jour après jour.

Il nous faut donner du temps au temps pour qu’une porte s’entrouvre. Avec certaines personnes,  plusieurs années ont été nécessaires pour qu’une relation devienne possible

La peur domine le quotidien qui est décrit par beaucoup par un sentiment d’enfermement, d’isolement, de « prison », de « fond du puit ». On entend également l’expression « on coule ».

Dans ces témoignages il est par contre, peu question de colère, face à tous ces empêchements à construire le quotidien de façon à ce qu’il devienne plus vivable, plus souhaitable. C’est plutôt la honte qui se manifeste, la honte de ne pas y arriver, de ne pas pouvoir offrir ce qui est essentiel à sa famille, de sentir ses enfants malheureux, frustrés,  et d’entendre les jeunes dire parfois  « la vie est trop dure ». La honte de se trouver face à son impuissance.  

Alors on préfère se taire et « cacher la poussière sous le tapis ».

A terrain d’entente nous ressentons pour de nombreuses familles un sentiment de découragement, de fatigue, d’usure. Pour certains même, des manifestations de dépression. Alors que lorsque nous nous retrouvons pour organiser des évènements, il est question la plupart du temps de dynamisme, d’enthousiasme et même de joie à participer, à s’inscrire dans les sorties avec de plus en plus de monde.

Petit à petit un espace de rencontres s’est construit, parce que nous sommes restés fidèles à nos rendez vous tout au long de l’année, parce que nous avons élaboré, tenté, bricolé sans relâche  et collectivement des solutions chaque fois que nous avons identifiés ensemble des problèmes, des besoins, chaque fois que nous avons osé exprimer des envies. C’est un  travail en commun qui se réalise, une mise en commun d’idées, d’initiatives, d’inventions. Nous élaborons toujours toutes ces tentatives à partir d’une conception qui nous est essentielles: l’intérêt général, l’intérêt de tous.

Ce travail, ces démarches qui parfois aboutissent,  construisent peu à peu un sentiment que quelque chose peut devenir  possible.   Le pas devient moins lourd, les têtes se redressent, l’espoir se profil, timide, mal assuré; mais il est bien là.

Ces expériences renouvelées au fil du temps redonnent un sentiment de confiance, en soi d’abord, puis avec certains. Nous retrouvons cette sensation indispensable, vitale, d’exister pour les autres, de contribuer au bien commun. Nous retrouvons le sens de l’existence, celui de participer, d’apporter sa pierre par son travail, par ses efforts, par notre capacité à savoir se bousculer, la fierté de savoir donner « le coup de collier » qui va rendre possible une action.  

Une adhérente de Terrain d’Entente me remercie souvent lorsque je lui demande de l’aide. A l’improviste, dans l’urgence, elle est toujours disponible pour donner le coup de main indispensable  pour faire des gâteaux,  qui vont  compléter le goûter de la prochaine fête,  des crêpes qu’on va vendre avec les enfants devant la médiathèque, de prêter tous les ustensiles de cuisine nécessaires pour faire les galettes sur le terrain, de s’occuper des bacs de jardinage qu’on laisse régulièrement à l’abandon….

Elle m’expliquait récemment que ce qui lui était devenu insupportable c’était d’être considérée par tout le secteur social comme « une bénéficiaire de l’AAH », quelqu’un « d’assisté », qui ne sert à rien, qui est inutile. C’est la plus grande souffrance de son existence.

Vivre dans un appartement inadapté, ne pas pouvoir faire face chaque mois aux charges incompressibles, ses problèmes de santé récurrents, elle peut supporter tout ça, mais sa vie devient  un enfer si elle se sent inutile. 

A partir de cette dignité retrouvée, il lui est devenu possible de parler de ce qui ne va pas, sans cette crainte de se sentir jugée, déconsidérée. Il lui a été possible de partager ces multiples expériences où tout semble perdu, condamné, destructeur.

Il est indispensable de savoir ensemble soulever ce tapis, et de voire ce qui est caché. Il faut  s’y cogner dessus et savoir s’indigner profondément face à  ces mauvais traitements infligés à tous ceux qu’on a placé à la marge, de tous ceux qui subissent les inégalités les plus flagrantes.

Mais ce qu’on découvre aussi dans ce quotidien toujours difficile, ce sont tous ces  rayons de lumières, toute la ressource infinie de chacun pour tenir,  résister encore, tenter l’impossible et finalement ne jamais couler complètement, ne pas s’effondrer totalement.

L’une d’entre nous  s’est retrouvée durant deux mois seule,  enfermée chez elle, sans pouvoir avoir le moindre contact avec son fils lourdement handicapé, parce qu’elle a été opérée d’une très grave fracture au pied. Sa CMU ne lui a ouvert aucun droit à une assistance à son domicile. Certains jours, elle a bénéficié de la solidarité du voisinage et de sa famille mais la plupart du temps elle a appris à se débrouiller seule pour faire ses repas, entretenir son logement, prendre soin d’elle.

Au cours d’une de mes visites elle m’a fait la démonstration de sa façon de s’organiser pour assurer tous les actes du quotidien. Elle commentait régulièrement ses différentes illustrations de ce qu’elle avait su mettre en place par: « tu me trouves courageuse! » …. Elle rayonnait…. Face à cette belle danse qu’elle m’offrait dans son fauteuil roulant, je me suis projetée quelques secondes dans cette réalité et j’ai su que je n’aurai pas pu trouver les ressources suffisantes pour percevoir un peu de satisfaction dans cet abandon.

C’est une aptitude qui se cultive justement dans ce désert là, lorsqu’on est confronté à soi même, face au mur, au silence à la souffrance et à la solitude. C’est une aptitude qui se développe quand on a le sentiment de n’avoir aucun autre choix que de tenir le coup dans cette totale adversité, quand il n’y a plus rien à perdre.

Cette aptitude correspond à une aspiration très profonde de vivre, d’exister, d’espérer. Notre humanité se nourrit de cette aspiration à quelque chose de meilleur. Une aspiration qui ne s’éteint jamais. Quand elle est éprouvée, vécue pleinement, cette aptitude  permet toutes les résistances, on sait alors avec certitude qu’on peut tout supporter, qu’on tiendra toujours le coup, envers et contre tout.

« Je sais que Dieu  ne me donnera pas des épreuves plus dures que ce que je peux supporter.« (sic)

Il se développe une confiance intérieure dans la vie elle même. Cette force là reste la seule parfois,  sur laquelle nous pouvons nous appuyer, à l’échelle d’un collectif, pour tenter ensemble de construire autrement, pour tenter de construire en restant fidèles à nos rêves à ce que nous souhaitons comme commune humanité, pour les uns, pour les autres, pour nous tous.

Cette rage de vivre devient le seul chemin possible pour pouvoir tenter ensemble autrement, pour trouver l’énergie nécessaire et la force de ne jamais renoncer. C’est le seul moyen d’ouvrir des espaces où quelque chose d’autre devient possible.

                                                                                                   Josiane GUNTHER Mars 2019

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« Une école de la réussite pour tous » Avril 2019

Terrain d’Entente a été invité a cette rencontre animée par Marie Aleth GRARD, vice présidente d’ATD Quart Monde.

Depuis plusieurs années nous sommes préoccupés des difficultés grandissantes que les enfants manifestent à l’école. Nous nous sommes engagés dans l’action « 1001 territoires » sur le quartier de Tarentaize. Plusieurs parents avaient contribués à ces temps de réflexion. Depuis deux ans, nous cheminons avec des enseignants membres de l’ICEM pédagogie Freinet,  pour engager un travail sur les possibilités d’ouvrir les écoles aux parents pour favoriser un accueil respectueux  du milieu de vie des enfants scolarisés.

Marie Aleth GRARD est membre du conseil supérieur des Programmes, elle siège au CESE à la section de l’éducation, de la culture et de la communication. Elle a travaillé en lien avec JP Delahaye, directeur général de l’enseignement. Elle nous a présenté la réflexion du CESE sur la réduction des inégalités à l’école dues aux origines sociales.

Le rapport du CESE de septembre 2011  sur les « inégalités à l’école » dénonçait déjà le fait que l’école n’arrive pas à atténuer les inégalités dues à l’origine social et culturelle. La loi de Refondation de l’école du 8 Juillet 2013 insiste sur le caractère inclusif de l’école, et qu’il est essentiel de se préoccuper de la réussite de tous. Les conditions d’une école inclusive: garantir une place en maternelle dès deux ans, éviter les fermetures d’école dans les petites communes, renforcer les RASED. Tous les parents doivent être accueillis à l’école à égale dignité. Tous les enseignants doivent être formés pour mieux comprendre le milieu d’origine des enfants scolarisés. Ils doivent être également formés à la pédagogie de la coopération qui permet d’avantage la réussite de tous. 

Permettre à tous les enfants et les jeunes de devenir citoyens dans une démocratie, pleinement insérés dans la société, tel est le défi que l’école doit relever.

La réussite à l’école signifie que les élèves doivent ont tous acquis le socle commun de connaissances et de culture, et qu’ils choisissent leur orientation.

Chaque année, depuis 15 ans, plus de 100 000 jeunes sortent du système scolaire sans aucun diplôme.

Pour aborder cette question des inégalités dues aux origines sociales et culturelles, il est nécessaire d’entendre la parole des parents socialement les plus exclus. C’est à partir des progrès des enfants des familles les plus défavorisées que nous pourrons mesurer la capacité de l’école à les faire réussir tous. Dans le cadre de cette recherche à l’initiative du CESE, un groupe « croisement » s’est réunit sur 7 journées: 5 chercheurs, 5 enseignants, 5 acteurs de quartier, 5 parents solidaires, 10 parents qui vivent dans la grande pauvreté

Ces journées d’échange ont permis de conclure que la réussite de tous est possible si:

 –   les enseignants travaillent en équipe, plus de maîtres que de classe. Favoriser les échanges pédagogiques entre zones prioritaires et les autres territoires 

 –   tous les parents sont accueillis à l’école

 –   une recherche permanente d’une pédagogie adaptée (respecter le découpage par cycle de 3 ans, développer la pédagogie de la coopération, développer l’apprentissage de la démocratie par la prise de parole donner à tous les élèves les moyens de faire leur travail personnel sur le temps éducatif)

 –   une gouvernance bienveillante et exigeante. (former les personnels d’encadrement à l’animation de l’équipe et au travail collectif, mettre en place une réflexion sur l’évaluation des enseignants, développer des programmes de recherche action en établissements)

Il est proposé d’expérimenter dans des écoles volontaires pendant 5 ans, ce cahier des charges

L’éducation prioritaire ne pas être la seule réponse, elle ne garantit pas une école ouverte et compréhensible pour tous.

L’école porte en elle ses propres forces. Les équipes pédagogiques cherchent, créent, innovent dans le but de ne laisser aucun élève au bord de la route. Elles ouvrent des voies qui devraient permettre de surmonter cet obstacle du déterminisme social auquel se heurte l’école. 

L’école n’est pas le seul lieu d’éducation, des projets en partenariat avec les quartiers peuvent naître avec tous ces collectifs qui construisent un tissu de relations où les parents ont une place privilégiée.  

Jean Zay, ministre de l’éducation à l’époque du Front populaire, estimait que l’école et les collectifs d’éducation populaire étaient les deux jambes de l’éducation et devaient oeuvrer ensemble.

9 Millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont certains vivent dans la grande pauvreté (cumul de précarités qui concernent le non accès à l’emploi, au logement, à la santé)

35% des personnes ne font pas la demande de RSA (12 pages à remplir)

Un enfant pauvre, quand il arrive à l’école maternelle a bénéficié de 1000 heures de moins d’histoires racontées.

Il se retrouve  souvent dans une posture de conflit de loyauté qui bloque les apprentissages de manière inconsciente. Il se retrouve dans une double solitude, à l’école il ne peut pas parler de son environnement social, en famille il ne peut pas partager ses expériences scolaires. Les parents ne peuvent pas s’intéresser à ce qui se vit à l’école parce qu’ils n’ont aucune connaissance de cette réalité. (On pose des questions sur l’école en fonction de ce qu’on en connaît: les codes, les langages)

L’accueil des parents à l’école facilite la découverte et la connaissance du milieu.  (accueillir tous les parents sur des temps formels et informels, multiplier les espaces parents avec un animateur, former les parents délégués en réfléchissant à un statut pour ces parents). Ouvrir l’école au partenariat qui a une connaissance du territoire sur lequel intervient l’école..

Les inégalités scolaires sont inhérentes aux dispositifs.

84% des enfants qui se retrouvent en SEGPA sont issus de milieux défavorisés (l’école estime qu’elle ne sait pas faire avec ces enfants là!). 1% obtiennent le brevet

37%  réalisent un CAP qu’ils n’ont pas choisi.

58% sortent du système scolaire sans aucun diplôme.

Pour réduire ces inégalités: meilleure inclusion des SEGPA dans les collèges, supprimer le volet social pour les affectations, redonner à ces affectations un caractère réversible, multiplier les dispositifs permettant aux enfants de grandir ensemble.

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Rencontre ICEM/Terrain d’Entente Mars 2019

Comment dépasser les frontières érigées entre les membres de l’éducation nationale et les différents membres de la communauté éducative, les associations d’éducation populaire, les parents….pour rendre légitime leur parole, leur volonté de devenir partie prenante et soutenir la lourde mission de l’école ? Dans les différents textes il est de plus en plus question de l’importance de la construction de ces liens et les verrous restent toujours aussi tenaces un peu partout.

Les parents peuvent trouver une place réelle dans l’école à partir d’un cadre scolaire, d’un projet éducatif bien défini par l’équipe enseignante qui en est responsable. C’est la seule façon d’apporter des repères sur les possibilités et les limites de la relation entre les membres de cette communauté éducative. C’est ce qui donne la possibilité à chacun d’avoir une grande liberté pour s’investir et devenir force de proposition en respectant cet espace particulier de l’école qui a un mode de fonctionnement propre et des contraintes qui sont importantes à bien identifier.

Les enseignants peuvent investir et apprécier ce travail de « collaboration » si le temps nécessaire est pris en compte dans leur charge de travail. on ne peut pas demander dans la durée à des enseignants de participer à ce type de projet qui nécessite beaucoup d’énergie uniquement sur leur temps personnel, de manière militante.

Les constats: Si les parents se sentent rejetés de l’école, les enfants ne sont pas dans de bonnes conditions d’apprentissage. On souhaite tous favoriser des conditions de bien être à l’école. L’école ne fait plus référence pour des enfants de plus en plus nombreux qui vivent ce qui s’y passe comme sans rapport avec leur réalité, leur identité, leur culture, leur famille, leur condition de vie, leur avenir. 

L’école ne peut assumer son rôle que si elle considère l’enfant dans toutes ses dimensions, elle se construit avec la participation des parents. Parents inquiets, qui cherchent à encourager les enfants dans leur parcours scolaire, mais impuissants à pouvoir être partie prenante d’un système qu’ils ne comprennent pas. 

Nombreux sont les parents prêts à s’impliquer si un espace leur est ouvert. Ils savent expliquer les freins à la relation avec les enseignants, et faire des propositions concrètes. Ils sont volontaires pour s’impliquer dans des rencontres pour favoriser la meilleure scolarité possible des enfants. Nous pouvons identifier, grâce à leur contribution, les besoins et les possibilités de transformation dans l’enceinte de l’école.

Les préalables à la réussite:

Une bonne compréhension mutuelle

Le postulat de la co éducation (parents, enseignants, structures) Nous sommes collectivement responsables de l’éducation des enfants.

Nécessité de créer des espaces de rencontre:                                                                                  Pour comprendre les préoccupations de chacun, mettre en question des dysfonctionnements, réfléchir à nos conceptions de l’éducation, créer une communauté éducative d’entre aide.

Comment rendre possible ces espaces?

Importance du lieu où se déroule les échanges: pas le hall d’entrée, sous le regard de tous

Il faut beaucoup de temps pour se reconnaître: des poses café (répétition de choses simples)

Des temps d’école ouverts aux familles (un accueil le matin sur un créneau horaire).

Des samedis matins pour parler des réussites, des projets, des réalisations.

Des ouvertures pour des ateliers à partir de compétences particulières, d’envies des enfants (parents, associations)

Certaines classes accueillent les parents sur des temps scolaire.

Des temps ponctuels pour des sujets d’actualité dans l’enceinte de l’école, les questions internes au fonctionnement de l’école. (que faire face à la déscolarisations; problème lié au temps péri scolaire; les devoirs à la maison: qui permet un lien quotidien entre l’école et la famille, quoi proposer d’autres pour maintenir ce lien régulier? ; problèmes liés à la restauration scolaire….)

Etre associé à ce qui peut être dit en classe face à des évènements particuliers qui traversent la société.

Prendre appui sur la communauté éducative: les différentes asso assurent la garde des enfants pendant des temps de rencontre parents/enseignants. Elles  peuvent être présentes à l’occasion de repas partagés ….

Cloisonnement entre les différentes structures (Marie, écoles, centres sociaux…) Que tous les acteurs se rencontrent qu’on n’entende plus « ça ne me concerne pas, c’est la Mairie… »

Un enfant qui relève de soins, représente un long processus d’acceptation. Les enseignants s’inquiètent parfois un peu vite, faire confiance au diagnostic des parents qui connaissent l’enfant dans un autre contexte, les autres structures. Les orientations interprétées comme un échec « qu’est ce qui va le mieux pour cet enfant là? » Le DRE peut jouer un rôle

Problème des délais d’attente pour les prises en charge spécifiques…  Le RASED doit retrouver les moyens nécessaires                                                                                              Créer un réseau d’entre aide avec des parents ayant traversés les mêmes difficultés « boite à outil des expériences de chacun ».

Trouver la bonne manière de se parler pour rétablir un niveau d’égalité dans les échanges

 » si vous êtes en retard, votre enfant peut être confié à la police » 

Les parents expriment beaucoup leur difficulté à prendre la parole. « Ca ne sert à rien de parler, on n’est pas entendu ».

Peur de l’institution, manque de compréhension de son fonctionnement, les horaires, incompréhension face au système scolaire, cigles, vocabulaire, lisibilité des intervenants. Les parents se sentent dévalorisés.

Les leviers: discussion devant l’école, mobilisation autour d’évènements, trombinoscope des intervenants, diffusion des comptes rendus qui ciblent les réponses aux préoccupations des parents.

Les parents dont la communication est plus facile, un poste de psycho, d’IDE, une personne extérieure à l’équipe enseignante peuvent assurer la médiation en cas de litige.

C’est possible de prendre des initiatives pour accueillir les parents dans l’école, à l’échelle d’une seule classe, même si toute l’équipe n’est pas enthousiaste face à cette perspective.

Des comportements peuvent se transformer. A l’exemple des enfants qui réclament à leur nouvel enseignant, les « quoi de neuf », les « conseils » suite à cette expérience positive de leur année scolaire précédente. 

C’est indispensable que l’école ne se retrouve pas seule sur son territoire, qu’elle puisse s’appuyer sur les autres structures pour construire une communauté éducative et chercher des solutions aux problèmes des familles.

C’est dans la simplicité et la diversité des propositions d’ouverture de l’école aux parents qu’on se donne le plus de chance de rendre accessible cet espace à toutes les familles.

Nous souhaitons ouvrir ces temps de réflexion aux écoles de la ville. Nous pouvons faire une proposition de démarche de co éducation que nous pouvons transmettre à toutes les structures concernées.

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